à l’oreille





Wing Audio 2.1 1

Wing Audio Modulation et HP 2.1

par LeBeauSon - novembre 2019


Perception d’ensemble

Lorsqu’un nouveau venu se présente sur le marché du câble, on a tendance à hausser les épaules, blasés, en pensant in petto : encore un ?

Et pourtant c’est une bien belle découverte que ces câbles Wing, enrichie qui plus est d’une rencontre humaine hautement appréciable.

- timbres : ils sont irréprochables. Ben oui, c’est court. Qu’y puis-je ?

- scène sonore : la façon dont les plans sont structurés dans un cadre de distances mais aussi de temps est très révélatrice, puisqu’on perçoit ici combien temporalité et espace sont intimement liés, comme dans la vie

- réalisme des détails : la transparence atteinte sur les divers systèmes inclus dans les équations du test a rarement été aussi manifeste, probablement parce que la linéarité tonale et dynamique, la vitesse sont telles qu’il n’existe plus la moindre altération pour venir diminuer, transformer, border la résolution supérieure

- swing, vitalité, dynamique : la musique avec Wing soupire, palpite, cœur battant, nourrissant le noyau des notes, le balancement des uns opposé à la rigidité des autres, qu’importe, Wing est champion du swing

- expressivité : Wing a compris le rôle exact des câbles dans la restitution : disparaître !

- rapport qualité/prix : est-ce bien utile ?

 

Nous sommes impatients de découvrir la suite, câbles numériques, secteurs, etc… mais aussi curieux d’entendre ce que les versions supérieures pourront bien offrir de plus.

Pour cette raison, je vais retrancher une étoile, afin de m’en garder une en réserve.

DIAMs 5 OR

 

Proposer un banc d’essai de câbles… Oui, ami néophyte, la haute-fidélité est un monde de fous…

Mais tu t’y habitueras, crois-moi. Tu comprendras un jour, en procédant à une comparaison avec l’aide de ton magasin préféré que (hélas ?) prendre en considération l’importance fondamentale des câbles n’est pas une vue de l’esprit ou un racolage mercantile…

« Bon » bougonneras-tu, compatissant, en lisant ces lignes, « somme toute, lorsqu’il s’agit de câbles de modulation ou de câbles dit HP », c’est-à-dire reliant l’amplificateur aux enceintes, « tout le signal passe à travers, n’est-ce pas ? »

Tout le signal ? Ben non, précisément, c’est bien là que le bât blesse… On en perd beaucoup au passage, on déforme, on malmène, on brutalise, on enrobe, on ment !

« Bon (deuxième « bon »), admettons ! » - te dis-tu cher ami profane – « Mais un câble secteur ???? » Nombreux points d’interrogation.

Ben oui… Aussi.

L’action en est plus difficile à comprendre sans doute. Or, indéniablement, son rôle est loin d’être négligeable.

Essaye, tu verras !

Pour ce premier banc d’essai de câble, je vais cependant t’épargner le câble secteur…

Pardon ?… Tu disais ?

Qu’est-ce qui me permet de te tutoyer ?

Hum… Xcusez-moi, m’sieur…

… Hum… Nombreux sont encore les sceptiques à propos de l’influence du câble dans la composition d’une chaîne mais, d’un autre côté, si on peut répertorier des centaines de marques qui en présentent des milliers au sein de gammes jalonnant un panel de prix d’une poignée d’euros le mètre à plusieurs dizaines de K€, il faut bien admettre qu’il y a un fond.

A condition de veiller à ne pas se faire piéger par les sirènes et rester vigilant : dans la multitude pléthorique de propositions, combien d’attrape-gogos ?


Que ce soit clair d’emblée :

- un câble ne fait pas de musique,

- il n’améliore pas les appareils qu’il relie,

- il ne transforme pas le plomb en or (sauf dans les poches de certains fabricants ou revendeurs).

Mais :

- il évite de perdre la musique,

- il permet à l’appareil de s’exprimer dans des conditions plus ou moins idéales,

- il faut l’intégrer dans les éléments de budget à long terme

Pour ne pas jouer les alchimistes (le plomb en or, vous voyez ?), il est important de rester prudent face au mirage de la compensation, conduite fréquente qui consiste à penser que le câble peut corriger un manque ou un défaut du maillon en amont ou aval ! Jamais !

Espérer que si votre chaîne manque de brillance, un câble peut en rajouter est une vue de l’esprit : s’il le fait il triche et plus précisément il est probable qu’il gomme tout le reste. Et inversement. Un câble qui viendrait rajouter du grave ment !

Un ami emploie une expression que j’aime bien : la compensation en hifi, c’est vouloir marcher droit en boitant des deux jambes.

Les français ne sont pas les derniers à s’être intéressé aux vertus des câbles et on compte maintenant dans l’hexagone un beau panel de propositions, certaines modestes (Real Câble), certaines ambitieuses (Esprit, Absolue Créations tiennent le haut du pavé depuis un petit moment et c’est parfaitement justifié).

Parmi ceux dont nous connaissons bien et apprécions les réalisations, on pourra aussi citer Neodio, Legato et Nodal.

Ca suffit pour les références avant même d’avoir envisagé les productions du monde entier. Des câbles, on en a écouté (subi ?) des centaines, certains franchement honteux, caricaturaux, qui plus est chers, d’autres honnêtes mais isolés dans une gamme peu cohérente (ce qui ne nous rassure pas), d’autres ne justifiant absolument pas leur prix, sachant que sur ce point, le prix est plus une affaire de valeur relative qu’absolue.

Mmmhhh… Pas bien clair ce que je viens de dire…

Nous reprendrons toutes ces explications sur le câble dans un tutoriel, je crois que c’est indispensable. Je veux dire par là que rien dans les ingrédients d’un câble ne peut justifier le prix final de certains mais, au-delà des études, des frais de communication, représentations, gestion etc… dans un marché complexe et étroit, c’est au sein des règles de la concurrence que se situe l’évaluation du prix final et c’est toujours comme ça que nous les observerons. Que vaut tel câble face à la concurrence.

D’où notre distance face à des câbles pas forcément mauvais mais dont le prix n’est pas justifié dès lors qu’il existe un compétiteur meilleur, à condition que celui-ci respecte les mêmes codes commerciaux : il subsistera toujours un bricoleur génial pour proposer un bon câble à un prix bas en oubliant toutes les règles d’une commercialisation à large échelle et les frais induits… Et donc passé un premier cercle de potes clients, son entreprise ne franchira pas le cap du vivotage…

Fiou… Quelle intro. En fait je l’ai écrit mon article sur les câbles, non ? Il va y avoir du copier/coller…

Tout ça pour dire que lorsqu’un nouveau venu se présente sur le marché du câble, on a tendance à hausser les épaules, blasés, en pensant in petto : encore un ?

Mais comme on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise, on ne refuse jamais la découverte.

Et parfois… Wing Audio donc…

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Wing Audio, c’est une affaire de famille autour du papa : Jean-Marie Dehaeze…

Un parcours atypique pour ce « jeune homme » : animé dès son plus jeune âge par trois passions, la musique, la technique et l’aéronautique, il conçoit des postes à galène, puis des petites électroniques et des enceintes acoustiques. Pianiste par ailleurs, ses lectures des aventures de Guynemer, Mermoz et Saint Exupéry (Clostermann ?) développent sa passion pour l’aéronautique et il choisit la carrière d’ingénieur pilote de chasse.

 

Mélomane et insatisfait de la reproduction sonore des nombreux systèmes audio acquis au fil des ans, il se met au défi de concevoir des enceintes acoustiques. Il dépose alors plusieurs brevets.

Après 20 ans dans l’Armée de l’Air, il met fin à sa carrière, refuse les nombreuses sollicitations d’entreprises intéressées par son parcours d’ingénieur pilote de chasse. Une retraite anticipée pour « services exceptionnels rendus à la Nation » lui permet de se consacrer à temps plein à l’acoustique en finançant sa recherche sur ses fonds propres.

Il reprend les cours d’aérodynamique et de mécanique des fluides dispensés lors de son cursus d’ingénieur à l’Ecole de l’Air pour se pencher sur les problèmes de reproduction du grave dans l’enceinte acoustique. De là nait un brevet. Tenace, persévérant, rigoureux, il refuse les nombreuses propositions de commercialisation de ses concepts, n’acceptant aucun compromis quant à la qualité de ces derniers.

 

Prenant conscience que les éléments en amont (électroniques et câbles) limitent la qualité de la restitution sonore des enceintes, il se penche sur les problèmes liés aux câbles.

Sa passion et son exigence de comprendre les phénomènes dus au transport d’un signal l’amènent à considérer comme déterminante l’influence néfaste de l’isolant sur le conducteur, et notamment l’influence rétroactive de la perturbation de l’isolant sur le signal véhiculé par le courant transitant dans le conducteur.

Hum… Oui, quand on n’est pas du sérail, c’est un peu rébarbatif. Mais chaque domaine a ses codes, non ?

Il se consacre alors aux moyens d’éviter que cette perturbation de l’isolant ne vienne « salir » le courant initial et donc le message véhiculé. Le concours de l’un de ses fils (garçons, pas fils au sens de câbles ! vous comprenez la différence, tout de même ?) - les deux dernières années - est déterminant : les études approfondies dudit fils en physique de la matière à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon, contribuent à améliorer considérablement la simplicité et l’efficacité des procédés déjà efficients.


Il en résulte un câble délivrant un message quasiment identique à celui porté par un câble nu. 
Jean-Marie dépose alors un nouveau brevet.

Ses années de recherches l’ont conduit à tendre vers l’excellence par toujours plus de simplicité, « condition » essentielle pour obtenir la plus grande fiabilité possible.

Après 15 années, enfin satisfait de la qualité de ses enceintes et câbles, et accompagné de son fils aîné ingénieur et directeur d’usine, il se lance dans la fabrication et la commercialisation de ses produits. La société Wing Audio est créée. L’aventure démarre en 2018.

 
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Les premiers câbles que nous allons découvrir sont des câbles modulation RCA et des câbles Haut-Parleur.

Dans la hiérarchie Wing, ils sont situés sur la deuxième marche, en précisant qu’il y en aura 2 au-dessus.

Dans la nomenclature Wing, ils s’appellent 2.1.

« 2 », parce qu’en dessous il y a le 1 et au-dessus les 3 & 4.

« .1 » parce qu’il s’agit de la première génération.

Difficile de faire plus simple, même moi j’ai compris.

De là à supposer qu’un jour il y aura un « 0,5.1 »…

Le modulation RCA est proposé à 4000 € en 1 m (à préciser)

Le câble HP à 6000 € en 2 x 3 m (à préciser également)

A terme, Wing Audio entend combler tous les compartiments, numérique, modulation symétrique, USB, Phono (avec DIN), etc…

La présentation est originale : les câbles sont gainés d’un cuir de haute qualité, cousu comme un passepoil. Le client peut choisir la couleur du cuir parmi 24 propositions. Les distributeurs étrangers vont être ravis.

           

Le raccord aux prises est net, peut-être un peu raide. Il faut dire qu’on a l’habitude des gaines thermo ou autres fanfreluches plus ou moins nobles permettant un raccord mieux intégré. La connectique du câble RCA est d’origine ETI, excellent choix.

Les câbles sont disponibles aux longueurs souhaitées.

L’emballage est soigné, d’une belle facture, sans pour autant grever le prix de revient. C’est une donnée à prendre en compte pour le fabricant s’il veut revendiquer sa place dans la jungle du haut-de-gamme, et agaçante pour le client final mélomane qui se moquera de l’écrin. Chez Wing, le compromis est bien dosé.

Enfin, dernière précision, pour éviter toute forme de « compensation » heureuse ou malheureuse, nous avons comme toujours croisé les combinaisons de matériel, et pour les Wing utilisé des sources analogiques Aurorasound, numériques Eera, Accuphase, Atoll et Grandinote, amplificateurs Accuphase, Tsakiridis, Engström, Atoll, Grandinote et Kondo (eh oui, m’sieurs dames), enceintes Mulidine diverses, Davis Courbet et Nikita, Living Voice, ppfff…

Remarque au passage : cela signifie que nous n’avons pas hésité à passer par des appareils moins coûteux que les câbles, comme ça pour voir et le constat est unanime. Cf ci-dessous…

Ah oui, j’ai failli oublier : au départ nous envisagions de séparer les essais du câble modulation et du câble HP, mais le résultat constaté étant exactement le même en alternant les écoutes, nous avons décidé que je rassemblerais nos constats pour la ligne complète. Bien sûr, la combinaison des deux affine nettement le faisceau des vertus.

 

 

RICHESSE DES TIMBRES ET ÉQUILIBRE TONAL

Je devrais me contenter de dire que je n’ai rien à dire. Ils sont irréprochables.

Bravo :

DIAMs 6 OR

 

Ah oui, c’est du milieu de gamme dans notre actuelle nomenclature. Donc j’aurais dû noter en rouge :

DIAMs MAX rouges

 

Hum… Le patron va me taper sur les doigts…

Bon, d’accord, je développe.

 

Premier constat : l’écoute est somptueusement détendue. Une sensation de bien-être s’installe dès les premières mesures. D’épanouissement même*.

L’ambitus est étendu. Très. Très. L’exploration d’informations parfois confuses dans l’extrême grave devient avec Wing limpide comme une carte topographique de l’IGN.

Cela signifie-t-il que les Wing descendent plus bas ? Pas forcément : ils sont surtout parmi les plus ouverts et décantent impeccablement le secteur abyssal, libérant ainsi des gammes inattendues. De surcroit, la gestion de l’énergie est constante en dynamique et en équilibre.

Why de Dani Siciliano, ou Family de Bjork sont d’excellents instants de bonheur musical pour vérifier ce point : on est surpris, notamment avec l’américaine, de la complexité des modulations dans l’infra, où l’air s’invite dans les inflexions pour définir des couleurs dans un registre qui prête souvent à embrouillement. Bon, évidemment, on profite de l’apport des Wing sur un système qui lui-aussi nettoie le brouillon, mais même sur un autre plus modeste, qui ne descend pas forcément aussi bas, on goute plus goulument les accents et impacts sans doute par une tension supérieure et une résolution incorruptible.

           

Les Wing batifolent aussi très haut sans le moindre resserrement d’image y compris sur des œuvres aux dynamiques luxuriantes et timbres entrelacés. Ainsi le Requiem de Verdi par Solti en 1968 (dans la version remasterisée pour le très beau coffret Decca, the Analogue Years) se déploie avec une aisance remarquable, sans le début d’une crispation. Les chœurs respirent magnifiquement dans un océan de couleurs et de nuances. Respirer dans un océan…

Joan Sutherland abasourdit par sa puissance (à défaut de son élocution proche du yaourt) et, contrairement à ce qu’on subit généralement, même lorsqu’elle « monte » avec une vigueur inouïe dans l’aigu, rien ne vient contraindre sa voix superlative, ni amoindrir la voluptueuse densité de son organe… Les Wing rendent pareillement un hommage mérité à Pavarotti en état de grâce…

Les éclats du Dies Irae jaillissent sans effort, dans des entrechats d’articulation inusités, les timbales introduisent une tension dramatique maximale sans étouffer la peau derrière l’impact, c’est très impressionnant !

Petit passage via l’inclassable « Gran Partita » de Mozart par des membres du LSO dans une version qui n’est ni la plus électrique ni la plus moelleuse mais fait la part belle à la plasticité. Un régal via les Wing qui harmonisent parfaitement les matières des divers instruments, avec le plaisir non seulement bien sûr d’isoler clarinettes et hautbois mais aussi de nettement distinguer par la fragrance de la texture chaque hautboïste, chaque clarinettiste et autres. C’est d’autant plus merveilleux que par ailleurs l’enthousiasme des musiciens (euh… subtil, très salon de thé) devient un nectar !

Qu’apportent les Wing par rapport à la grande majorité des compétiteurs ? Il n’y a pas une once de scories, de coquetterie, de facétie factice ! La transparence exceptionnelle est d’une pureté sans faille et fait d’ailleurs apparaître sur certains câbles que nous estimons une sorte de réfraction un peu systématique, subtil albédo qui ne nuit absolument pas à la résolution mais agrémente un tant soit peu la rigueur des ambiances et sur d’autres au contraire un vertueux assombrissement un peu simplificateur.

Les Wing bénéficient d’une bienveillante matité qui satisfait pleinement les sens branchés en direct sur l’expression musicale !

 

 

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SCÈNE SONORE

Tout semble aller de soi avec les câbles Wing.

On imagine difficilement pouvoir obtenir une si précise élocution, une bande passante aussi étendue, un équilibre tonal et dynamique aussi parfaits, des timbres aussi naturels sans une scène sonore au cordeau, car passé un stade de qualité, les composantes du son participent toutes de la même alchimie.

Inutile donc de prendre des gants : si elle peut paraître moins vaste que parfois, la scène en largeur, profondeur, hauteur, est incontestablement juste, immuable, plausible.

La façon dont les plans sont structurés dans un cadre de distances mais aussi de temps est très révélatrice, puisqu’on perçoit ici combien temporalité et espace sont intimement liés, comme dans la vie, indissociables au point que distinguer le placement de musiciens ou évènement sonores dans les 3 dimensions ramène immédiatement à une notion de cadence mieux déroulée. Les enchaînements de modulations, pigmentations, rythmes, mélodies, structures musicales au sens large sont à la fois explicitement séparés mais au sein d’une exactitude holistique concrétisant un sentiment du vrai rarement atteint jusqu’alors sur les systèmes employés pour le test.

On peut avoir l’impression d’avoir parfois goûté une dynamique plus libre, mais il ne faut pas longtemps pour être réconforté par l’évidence que cette perception tient à la disparition totale, sur les Wing, de petites distorsions ou manque de contrôle auxquels on s’était habitué, comme allant de soi ou faisant partie de l’enregistrement.

L’absence totale de séduction félonne conduit à une méticulosité dans le déploiement des évènements qui sublime la seule beauté de l’expression musicale.

Nous le vérifierons par exemple lors d’une comparaison de quelques câbles de référence (que nous ne remettons absolument pas en question) sur la superbe version du Firebird par Andrew Litton à la tête du Bergen Philharmonic chez BIS où les Wing, dévoilant avec une délicatesse diaphane un tout petit peu plus pertinente les fibres pastellistes d’un orchestre en pleine forme, accompagnent l’approche quasi impressionniste, « debussyenne », du chef et révèlent un placement au millimètre des très nombreux intervenants très exposés par le choix risqué d’une dentelle coloriste plutôt que par la grandiloquence d’un ballet spectaculaire, dans une atmosphère nous plaçant à une plausible distance de la scène dont on devine la nature et les dimensions sans l’ombre d’un doute. Les ruées dynamiques sont sous un contrôle de fer exprimant des nuances de bois, cuivres et peaux d’une rare intensité physiologique. Un grand moment.

           

J’ai cité Why de Dani Siciliano précédemment : restons sur cette formidable leçon pour profiter à fond d’un déroulement comme plus lent, au sens de mieux installé dans le tempo et découvrir que ce coulé plus souple tient à une séparation exemplaire des volumes dans l’espace, les juxtapositions de voix, distinctes comme jamais, balayent les duretés habituelles dues à la simplification des superpositions. On ne perd jamais l’énumération « one, two, three, four » dont on peut suivre les évolutions partout au milieu du morceau même quand la partition se charge en instrumentation et difficultés.

Dans le même passage, les textures dans l’infra sont animées de mouvements qui valsent dans la théâtralité si minutieusement composée. Le piano, plus plein, plus massif, prend possession de la pièce un bon mètre devant les enceintes sculptant une densité entendue sur une seule référence de câble jusqu’alors.

La superbe captation visiblement sans trop de trucages du Quartetto Italiano nous proposant une intégrale Beethoven (fin des années 60 ? J’ai un doute) faite de plasticité pure, vitalité et d’ampleur olympienne est le moyen de confirmer (j’ai choisi l’Op. 130) la capacité des Wing à introduire la pièce où a été enregistrée l’œuvre dans l’environnement des enceintes. Je n’ai pas été déçu, bien évidemment, saisi en outre par l’intensité du grain des boisés de chaque instrumentiste, prenant conscience que soit le Quatuor possède des instruments exceptionnels, soit leur sens de la beauté sonore sublime leur outil. Sur un système de référence via les Wing, c’est le vernis du bois qui luit sous nos yeux voire parfume la pièce d’authenticité troublante. Un autre grand moment.

L’orgue du Conservatoire de Paris dans l’œuvre de Jacques Pichard, La Trahison de Judas, respire en pleine liberté, prend une ampleur spectaculaire et alors que j’avais toujours estimé que cet orgue, sur cet opus puissant et douloureux, n’était pas le plus riche qui soit, développe soudain, outre une énergie de Vulcain, des jeux de couleurs croisées du plus bel effet.

DIAMs 5 OR 1 Rouge

 

RÉALISME DES DÉTAILS

Sur quelques mesures, on peut (c’est arrivé à certains lors de notre test) avoir l’impression d’une moindre moisson de renseignements que parfois. Pour se rendre compte que non : la plus minuscule ponctuation de subtilité est bien inscrite dans le paysage, mais à sa juste place dans le biotope, dans son exact éclat, sans la moindre luminosité flatteuse, ni nimbe jolie. Un peu déstabilisant au départ, on se rend vite compte que ce sens du détail est un vecteur important de la voluptueuse volubilité de l’ensemble, préservant par exemple une qualité d’amorti des suites de notes qui évidemment participe à la présence sensuelle.

La transparence atteinte sur les divers systèmes inclus dans les équations du test a rarement été aussi manifeste, probablement parce que la linéarité tonale et dynamique, la vitesse sont telles qu’il n’existe plus la moindre altération pour venir diminuer, transformer, border la résolution supérieure.

Rien en effet ne peut-être ajouté, retranché, changé sans corrompre le déroulement de l’enveloppe de chaque once musicale, goutte de bonheur dans une mer de félicité.

Mais évidemment, cette avalanche d’escarbilles prolixes n’est en rien due à un amaigrissement quelconque : il y a de la chair, du sang, du corps derrière chaque ponctuation de phrase…

Actors de Saint Vincent, et plus particulièrement « Black Rainbow » scintille de milliers de petites corolles bariolées autrefois cachées dans la sylve.

La longue ascension finale en devient d’autant plus poignante, voire oppressante, que le grain des grappes de synthé gratte avec un mordant aussi paradoxalement délicieux que dérangeant.

Par la même Annie Clarke, parce qu’on n’a pas pu résister, on a passé « Savior » dans la version Voix / Piano (Masseducation) pour être aussitôt submergés d’une émotion animale : alors que la magistrale jeune femme, vocalisant « pleeeease », embellit la supplique meurtrie de trilles détorses, sa voix fleure le velouté de la cyprine…

……… Hum……… Si vous ne savez pas ce que c’est, pour une fois, n’allez pas voir…

Le piano de Evgueni Sudbin nous proposant un très beau programme Beethoven est aromatisé de pigments délicats exhalés par les doigts virtuoses proposant un Beethoven tout en richesse harmonique, phrasé, une main gauche particulièrement inspirée alternant d’une assurance prononcée à une légèreté d’almée. La perception de la mécanique du Steinway ajoute à l’engagement du musicien dévoilant l’ivoire sous les doigts…

Débauche de délices en arpentant la somptueuse proposition de Claudio Abbado pour la Symphonie Fantastique dans une version pourtant bizarrement captée. D’autant plus émouvante qu’il s’agit du dernier concert du Maître avec le Berliner, soit, mais n’y allons pas par quatre chemins : les Wing insufflent une copieuse dose supplémentaire de saisissement.

Et Dieu (ou mon patron) savent que je n’aime pas dire ça, considérant que l’émotion est un acte de réception… Mais j’y reviendrai.

Effloraison de couleurs délicates, le Berliner ronronne comme un beau V8 serein, avec une précision d’horloge suisse, d’où surgit une ondée d’arômes, de teintes, de vocalités, tension nerveuse quand il faut, finesses et déliés de chaque pupitre auxquels le mage Abbado sait fourbir un écrin avec un talent unique illustrant de génie des imminences qui semblent si évidemment composées pour lui.

Là encore, la capacité des Wing à discriminer les timbres, les temps, l’espace, à amortir dans un dénouement insondable les prolongements de notes, autrement dit l’extraordinaire pouvoir de séparation, gomme les duretés grâce à la totale compréhension des informations majeures et des réverbérations, effets de mixage, superpositions… Le tout au service de l’œuvre, bien évidemment car le piqué des Wing profite généreusement aux frémissements internes de la partition, l’élan et lien permanents, l’homogénéité artistique !

Autre monde (mais à peine) avec Messhugah (métal progressif et avant-gardiste, du vrai du lourd (pas sûr que ça plaise à M. Dehaeze)) beuglant l’impensable « I » morceau de 21 mn que le groupe s’avoue incapable de jouer sur scène du fait de la complexité rythmique. Les Wing sur un système de référence (en l’occurrence EERA Majestuoso + Engström Arne + AVA de ppfff) excellent à décrypter les structures rythmiques et asymétriques improvisées, jouant sur la déstructuration, donnent à ce métal herculéen et très corrosif une intelligibilité qu’on ne peut pas soupçonner sur ce type d’opus, rendant justice à une œuvre originale et passionnante de bout en bout.

Sans rogner la fureur et l’impact, sinon à quoi bon.

Le vrai problème que posent les câbles Wing que nous écoutons, non, pardon : que nous utilisons pour écouter la musique, est de se demander ce que pourront apporter les modèles supérieurs. Or, le pire, c’est que nous sommes convaincus que ça apportera quelque chose.

Ce qui conduit à une vraie impasse de cotation, n’est-ce pas ? Qu’importe, la cotation doit refléter l’enthousiasme ou son absence :

DIAMs 6 OR

QUALITÉ DU SWING, DE LA VITALITÉ, DE LA DYNAMIQUE

Tout en décontraction, rebonds, malicieux détours de stupéfaction dans une forêt éclairée de l’intérieur par des rais empoussiérés de soleil où l’on devine la biche frissonnante, la musique avec Wing soupire, palpite, cœur battant nourrissant le noyau des notes, le balancement des uns opposé à la rigidité des autres, qu’importe, Wing prend une place de champion du swing directement à côté de notre référent.

Red Paint par Neneh Cherry met à nu sa réelle dimension dramatique alors que l’attention pourrait être dissipée par la richesse inhabituelle des matières des percussions, des bruitages qui ici s’intègrent totalement à la déclamation accablante mais si accorte de la grande dame ; ainsi, la complainte comminatoire bouleverse par l’authenticité de l’engagement, le sang sur le trottoir, la mort de l’enfant, menant au culminant la charge émotionnelle.

Idem jeu de miroir pour le superbe titre d’Arthur H, la boxeuse amoureuse, où le chant du monsieur à la voix si contradictoire apparaît d’une souplesse chaude et chatoyante, modelée avec cœur, et les halètements et lignes féminins qui l’accompagnent prennent une dimension onirique merveilleuse. Jeu de miroir parce qu’en même temps les Wing ne permettent plus de cacher qu’on a bien affaire à une production française, où les éléments musicaux sont isolés et comme plaqués les uns sur les autres, ne formant pas une totale symbiose… Et alors ? Nos amis présents lors d’une séance d’essais pleurent…

Si la dynamique foudroyante dans la 11ème Symphonie de Chostakovitch par Andris Nelsons et le BSO confirme l’aisance hors norme des Wing à maîtriser la cruauté de la progression de la charge militaire - des glissandos nauséeux des trombones symbolisant la foule paniquée jusqu’aux déflagrations barbares du massacre - dans un développement plausible, sans distorsion, sans crispation, tout en naturel, on appréciera tout autant l’aurore frémissante au lendemain du massacre, la lamentation faite de sensibilité et mystère douloureux.

Et puis comme il en faut bien un peu (on a écouté tant de choses que passé un moment, j’ai cessé de prendre des notes), parlons jazz, avec… Prince, et cet étrange exercice qu’est N.E.W.S. album instrumental enregistré en une journée à Paysley Park par Eric Leeds très à son aise, l’incommensurable John Blackwell, Ronda Smith qui joue façon le petit chouchou des hifistes mais au service de la musique, pas de la démo (pas pu me retenir), Renato Neto (et ses mille doigts) et évidemment le patron très discret… Ben non : je n’en parle pas. Une leçon de groove aussi divinement retranscrite, sans les fréquentes duretés du saxo et avec la puissance d’une basse qui pourrait soulever une cathédrale, une leçon de musique racontée par des « amis » en état de grâce, ça ne se commente pas…

Aucun aria ne résiste sur le chemin de l’entéléchie harmonieuse : il y a ici une sorte de nœud charnel permanent, des notes, des êtres, une croisière sur des ondes huileuses ou tempétueuses, peu importe, qui vous connecte aux artistes, repousse le silence pour remplir l’air des embruns de l’amitié, du partage, la main tenue ou parfois celle qui caresse l’épiderme délicieux d’un acte d’amour…

Swing, groove, vie, que peut-on louer le plus ?       

DIAMs 6 OR

 

 

EXPRESSIVITÉ

Franchement, comme évoqué plus haut, ça me dérange de dire ça, néanmoins je ne peux le nier : les Wing apportent un supplément d’âme, de cœur, d’humanité, autant de viatiques bichonnant l’émotion…

Invariablement, sur chaque disque écouté, apparaît un frisson, une étincelle divine, une grâce naturelle qui rend chaque musicien, chanteur, compositeur plus sensible, plus affirmé, plus riche artistiquement et émotionnellement. C’est sublime et attendrissant, comme ça peut être impitoyable si le musicien est médiocre car avec Wing la musique ne peut plus mentir …

Wing a compris le rôle exact des câbles dans la restitution : disparaître !

« Car aucune raison n’est assez puissante pour outrepasser le désir d’être en accord avec les marées, le passage des saisons et les rythmes sous-jacents à tout ce qui nous entoure. »

DIAMs 6 OR

 

 

 

 

PLAISIR SUBJECTIF

Sur les produits d’exception, le thème est un peu hors sujet. Le plaisir est celui d’une qualité sans compromis apparent ou flagrant – dans le cas présent, j’oserais presque dire : sans compromis. Or, sauf à chercher à truquer la restitution, fausser un regret par une autre fausseté, que demander de plus pour son bien-être mélomane.

DIAMs 6 OR

 

 

 

 

RAPPORT QUALITÉ/PRIX

Est-ce bien utile ?

DIAMs 6 rouges
(eh oui, en théorie, on est dans la catégorie milieu de gamme…)

DIAMs 6 OR

 

 

* Comme je tiens absolument à être le premier à faire cette blague pourrie, je la fais : « les Wing donnent des ailes ».

C’est fait, on n’en parle plus.

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