à l’oreille





par LeBeauSon - Août 2020


Perception d’ensemble :

Deux machines complémentaires à plus d’un titre choisies dans la gamme Choral de la prestigieuse marque Chord.

Oui, une fois de plus, on vise un peu haut. Et donc, on est naturellement plus exigeant.

DAVE CHORD 4

Blu MkII CHORD 1
On aime ou on déteste l’esthétique marquée de ces objets, mais pour ce qui est de leur expression musicale le constat est simple : le cœur et le corps des timbres formalisent d’emblée l’orientation des deux objets, à savoir faste et générosité.

Surmontant la petite rondeur d’un confort visiblement voué à la douceur, les déferlements de couleurs d’un orchestre raffiné et tendu ne manquent pas de richesse, de relative précision dans les ombres et surtout d’une qualité d’articulation qui place d’emblée l’ensemble Blu MkII + Dave dans la catégorie des grands appareils de lecture numérique.

D’une haute-technologie pensée pour durer, les lecteurs Chord peuvent représenter un choix de long terme, notamment en prouvant à ceux qui estiment que « le numérique c’est froid et chirurgical » qu’ils ont tort.                                                                                     

DIAMs 3 OR 1 ORANGE

 

Je ne vais pas m’éterniser sur la genèse de Chord Electronics Ltd

Chord Electronics est une société britannique crée en 1989 par un certain John Francks qui avait préalablement œuvré dans le monde de l’aviation, l’avionique pour être plus précis.

Sachez que c’est précisément le genre d’information dont je me contrefiche totalement. Mon père et mon frère ont aussi bossé dans ce domaine, à des degrés divers d’expertise, et le fait que l’un comme l’autre aient contribué à éviter que les avions long-courriers se cassent la figure ou que les avions de chasse soient des armes plus redoutables pour leur pilote que pour leurs cibles, n’a aucun rapport avec les vertus requises pour faire vibrer nos sens en dévorant la musique.

Ce n’est pas antinomique non plus, soit.

Chord Electronics explore consciencieusement certains domaines d’innovation en électronique, travaille depuis toujours sur l’alimentation à découpage et sur des circuits objectivement innovants. Là aussi, je suis tenté de dire : et alors ?

J’ai le souvenir de ma première rencontre avec un amplificateur intégré Chord pas donné, et j’avais été franchement admiratif de la qualité des timbres et d’un équilibre tonal indéniablement juste – préfigurant bien en amont, en plus gros et plus moche, la ligne de pensée Devialet -, mais aussi désappointé par le manque d’allégresse qui se dégageait de la reproduction « sonore ». Préfigurant l’évolution de Devialet en plus gros et plus moche.

Indéniablement certaines prouesses objectives de la marque ont impressionné divers acteurs du monde professionnel ; toutefois, une fois de plus, la liste des « institutions » concernées me laisse totalement indifférent pour bien connaître le fonctionnement desdites institutions qui, soit fonctionnent sous « diplomatique pression de l’état » pour favoriser la production locale, soit reçoivent gratuitement des bidules prestigieux à condition d’autoriser une photo et un référencement.

Afin de balayer immédiatement toute objection : ça ne signifie pas que les marques concernées soient pourries, mais n’est en rien une preuve de qualité non plus ; il se trouve que j’ai bossé avec quelques-uns de ces « studios » ou apparentés et en connais donc les « nécessités » ou aubaines politiques.

Merde à la fin.

Les produits Chord Electronics se distinguent par leur conception obsessionnelle, leurs technologies de pointe et leur remarquable qualité de fabrication, garanties de fiabilité indiscutable.

La marque est encensée depuis toujours par la presse spécialisée, ce qui pourrait tout autant être preuve de suspicion.

Mais comme je sens bien que mes propos énervés peuvent donner l’impression que j’ai une dent contre ce genre de repère (repaire) identifié de l’intelligentsia hifi qui fait tant préjudice à la musique, je vais immédiatement poser les jalons du BE qui va suivre :

L’ensemble Chord Blu MKII + Dave fonctionne vraiment bien.

L’introduction n’ayant pour but que de préciser combien je me fous des références d’un CV. La haute-fidélité vaut aussi par le talent de petits artisans astucieux et bosseurs. Voire autodidactes.

Pour tout dire, j’aurais bien aimé avoir à tester des appareils de la série Table Top, dont les fameux Hugo, parce que le peu que j’en ai écouté m’a paru vraiment euh… Top ? Franchement !

Les appareils de la série Choral passés entre nos oreilles critiques sont :

                                       

- Le transport (qui est aussi Up-Scaler jusqu’à 768 kHz) Blu MkII (ça ne veut pas dire « hi » « hi » mais 2). Dépourvu de sorties analogiques (de convertisseur), il ne peut fonctionner seul…

- … et son complément naturel : le convertisseur numérique/analogique Dave

Mode combinatoire complexe du fait que le Blu Mkhihi, par sa fonction d’Up-scaler peut aussi être utilisé à partir d’une source extérieure.

Ami lecteur que j’aime et qui se moque de la technologie ou ne prétend pas s’y connaître, tu te demandes : mékéceussai un Up-Scaler ?

Ben… pour simplifier disons que c’est un circuit électronique ou un processeur ou un développement informatique qui prend un signal d’origine plus ou moins simple, par exemple celui qui sort d’un banal CD, soit du 16 bits et un échantillonnage (découpage) à 44 100 Hz pour les transformer en flux de 32 bits (ce qui, en terme de traitement, représente beaucoup plus que deux fois la base) et un découpage plus fin pouvant aller jusqu’à 16 fois celui d’origine. Ou est-ce plus ? Les ravis du chiffre corrigeront, et que vivent les réseaux sociaux.

Donc, un algorithme.

La fonction Up-Scaling du Blu MkII est à prendre au premier degré : elle multiplie l’échantillonnage, pas le flux.

Wadia proposait le même principe il y a quelques décennies, avec des moyens techniques plus balbutiants et le résultat était assez minable.

Mais qu’est-ce que j’ai aujourd’hui ? On dirait que je suis en colère. Non, même pas.

Vous le verrez dans les constats d’écoute qui suivent : sur le système Chord, le principe technique est foncièrement efficient.

Passons donc à ce cher Dave, tout en étant assez surpris de l’hommage rendu par de glorieux sujets de sa majesté à un chanteur batave vintage (et si drôle !), dont certes les particularités vocales (« Vanina ah ah oh ah ah… », voyez ?) ne facilitent pas le travail des algorithmes…

… Ou alors le nom ne viendrait pas de là ?… Mmmhhh… Possible.

Dave est un DAC. Muet tant qu’il n’est pas branché à une source numérique, drive ou lecteur réseau, accompagné ou non de son copain Blu disponible en alu naturel ou noir. Pas en bleu. Le cœur du Dave est composé d’un convertisseur entièrement développé par Chord appelée FPGA Spartan 6 qui aurait une puissance de traitement 1000 fois supérieure à celle de puces traditionnelles. Personnellement, je ne sais pas ce que ça veut dire. Je vois l’idée, soit, mais : quelle puce traditionnelle ? Déjà. Le tout évidemment associé à une alimentation à découpage, cheval de bataille emblématique de Chord.

Est-ce le moment d’évoquer l’esthétique des objets cybernétiques ? Oui.

Ces deux modèles font partie d’une série appelée Choral, qui compte aussi un lecteur CD, un amplificateur, un préamplificateur et un pré-phono. La ligne est mi format et les éléments en sont empilables par un piètement optionnel, appelé support de table, composé d’un berceau en aluminium et de quatre pieds conçus pour pouvoir être imbriqués dans ceux de la série dite « Full Size ». Ce qui est bienvenu puisque le DAC Dave est actuellement le haut de gamme des convertisseurs de la marque.

La présentation des engins est « classiquement » futuriste. Je veux dire par là (par où ?) que les objets évoquent la science-fiction codée depuis « 2001, l’Odyssée de l’Espace », chef d’œuvre impérissable (chef d’œuvre donc) autant d’Arthur Ken Clarke et Douglas Trumbull que de Stanley Kubrick (j’ai lu quelque part que les maquettes de vaisseaux auraient été réalisées par celui qui allait plus tard créer les excellentes platines vinyles Michell).

La forme générale est celle d’une brique pleine, dont les deux côtés latéraux sont en arc de cercle, comme taillée dans un superbe morceau d’aluminium ; l’usinage est parfait. Les objets sont aussi le royaume des loupiotes, têtes de vis et gravures sophistiquées, un peu trop pour moi. Il faut reconnaitre que la superposition des deux outils sur le rack finit par en faire une sculpture. Le rack que j’ai eu entre les mains était en finition « chromée » (en l’occurrence appelée nickel), ce qui est un peu jusqu’au-boutiste mais il est aussi disponible en alu anodisé silver ou noir pour s’accorder à la couleur des appareils.

Le chargement du CD (mécanique Philips CD-Pro 2M) se fait par un couvercle façon clapet ou fermeture de sas d’un sous-marin. Un look Jules Vernes revisité. La manipulation de ce couvercle est agréable même s’il faut veiller à freiner le puissant rappel au moment de le refermer.

Sur le convertisseur Dave, c’est un gros hublot incliné que l’on remarque en premier, bourré d’affichages de données diverses, clairement lisibles (dans l’axe) et distinctes par une multitude de couleurs. Sur le dessus, à droite, 4 boutons entourant une molette rotative en tête d’obus permettent de voyager dans les menus ou choisir les fonctions et réglages, tout simplement.

Sorties symétriques et asymétriques, diverses entrées, complètes mais sans extravagance à l’exception de la double liaison possible avec la fonction Up-Scaling du Blu.

Point important : une sortie casque très soignée en façade.

La télécommande fournie est d’un look plus banal mais complète.

Aucune envie de me lancer dans un descriptif technique qu’il suffit d’aller chercher sur le site très complet du distributeur.

Prix indicatif des bébés :

- Blu MkII : 9 990 €

- Dave : 10 990 €

- Rack : 1 790 € par élément

 

Vous qui reprochez à mes articles d’être longs, vous allez être servis car nous avons procédé à des essais par étages :

- Dave avec source lecteur réseau

                                                                         

- Dave + fonction Up-Scaling du Blu, même principe que précédemment

- test comparatif lecture CD (suréchantillonnée après divers essais) versus fichier du même CD rippé sur l’ensemble Blu MkII + Dave

 

La lecture réseau passe par un ensemble lecteur réseau / serveur Antipodes, player Roon*, connexion USB

Pour le test de comparaison entre lecture CD directe et lecture du même disque rippé (transféré sur un serveur), nous avons utilisé la procédure suivante :

- CD rippé en 16/44 par dBPowerAmp soit en wave soit en flac non compressé selon les cas, ce qui sera précisé en cours de texte

- lecture depuis lecteur réseau / serveur Antipodes, en liaison USB.

- et, par curiosité, depuis un vaillant petit lecteur réseau Bluesound Node 2i en liaison numérique Spdif.

DAVE CHORD 2

Il faut tenir compte pour ces essais comparatifs de type de lecture (CD vs fichier) d’un point important : la source réseau de référence (Antipodes + câble USB) a un coût supérieur au Chord Blu, sans bien sûr en remplacer la fonction Up-Scaler. Mais c’est aussi une des meilleures que nous connaissons ; ceci dit afin d’éviter toute confusion, car il eût été dommage de restreindre les possibilités des Chord en n’octroyant pas une source externe à la hauteur.

Et même le bref essai mené par l’intermédiaire du Node 2i, lui très peu coûteux, doit être pondéré par le prix du câble numérique que nous avons utilisé pour cette configuration qui coûte… ben le prix d’un câble, quoi : celui d’une Porsche. Une petite. D’occasion. Pas un modèle historique.

Des câbles de liaison entre les deux appareils Chord font partie du package fourni par le distributeur, mais en l’occurrence, les câbles entre les deux appareils qui nous ont été prêtés par le distributeur étaient des Wireworld d’un prix très raisonnable (environ 230 €, sachant qu’il en faut 2 pour bénéficier de l’Up-Scaler).

Votre revendeur préféré vous expliquera tout ça avec plus de détails si besoin est. Sinon, vous branchez et vous écoutez.

Les tests ont été menés essentiellement sur trois amplificateurs intégrés, en symétrique et asymétrique.

- Accuphase E800

- Grandinote Essenza

- Kondo Overture PM-2i

Enceintes Davis MV-One Master, ppfff ADA et AVA, Mulidine Harmonie V3.

Câbles Absolue Créations, Neodio et Wing Audio.

 DAVE CHORD 6

Musique Maestro :

 

RICHESSE DES TIMBRES ET ÉQUILIBRE TONAL

Le cœur et le corps des timbres formalisent d’emblée l’orientation des deux instruments : faste et générosité.

Daniel Lozakovich, accompagné par le National Philharmonic Orchestra of Russia sous la direction de Vladimir Spivakov exécute une respectable version, hélas trop indécise, du Concerto pour Violon Opus 35 de Tchaïkovski (DG, fichier HR disponible sur Qobuz). Traversé de quelques fulgurances, le lyrisme du jeune suédois peine à trouver son cap comme son rythme, trébuche entre la prouesse technique et la théorisation d’un romantisme moderne, engendrant parfois même quelques imperfections de filés. Le gamin n’est pas vraiment secouru par son mentor Vladimir Spivakov dont la direction d’orchestre n’est clairement pas le premier talent puisqu’il ne parvient pas à extraire une vraie personnalité de son admirable outil ; il faut toutefois reconnaître à l’ensemble une beauté sonore supérieure, que ce soit l’ampleur du violon, la respiration de l’orchestre et le scintillement des timbres. Pas d’effusions artistiques bouleversantes mais une munificence plastique indéniable.

Beauté exaltée par le convertisseur Dave : surmontant une petite rondeur de confort qui flatte une zone moyenne/basse du spectre, les déferlements de couleurs d’un orchestre raffiné et tendu ne manquent pas de richesse, de relative précision dans les ombres et surtout d’une qualité d’articulation qui place d’emblée le Dave dans la catégorie des grands convertisseurs, visiblement voué à la douceur, manquant peut-être d’un peu de mordant et de sensibilité expressive.

En passant par l’Up-scaler du Blu, on franchit un net cran de transparence, les couleurs s’illuminent et les prolongements de notes s’épanouissent ; détourage plus fin des intervenants, silence plus pleins et qualités des modulations affinées intègrent mieux l’aguichante flagornerie tonale mentionnée auparavant (sans l’abolir pour autant), en explorant plus subtilement les matières et coloris.

Le résultat est superbe.

Un peu trop ? Pas impossible.

Le développement harmonique rappelle quelques aspects qu’apprécient particulièrement les piquousés de certains amplificateurs à tubes à l’ancienne, à savoir un bouquet harmonique touffu mais pas exactement naturel ; avec l’ensemble Chord, cette chaleur « controuvée », objectivement variée, ne nuit jamais à la grâce lyrique.

C’est après coup que je me suis demandé pourquoi je n’avais pas choisi la version de la star auto-proclamée Nemanja Radulović avec le Borusan Istanbul Philharmonic Orchestra dirigé par Sascha Goetzel, parue en 2017 (chez DG aussi), où, injectant certes quelques audaces malicieuses, le beau gosse aux longues boucles se montre très respectueux du texte pour confectionner une étincelante version, extériorisant les contradictions et démons du compositeur comme rarement par des lignes de chant inspirées d’un souffle pur. L’accompagnement par un orchestre juvénile n’hésite pas à voguer de l’incandescence vers une infinie mélancolie imbriquant une remarquable fusion avec la prouesse du soliste**.

                                                                                                                                            

C’est encore en ajoutant l’Up-Scaler du Blu au convertisseur Dave (on dirait un langage codé) que la verve et la disparité des couleurs, solistes et orchestres, se creusent entre les deux versions (fichiers HR tous les deux), alors que la plasticité sonore est possiblement du côté du challenger Lozakovich.

Je vais rester sur une vaste phalange pour comparer la lecture d’un CD sur le Blu (+ Dave), fonction Up-Scaler activée, et le même passage en fichier rippé.

La Mer de Debussy (comment va-t-elle, au fait ?) par Claudio Abbado et le Lucerne Festival Orchestra en 2003 (toujours chez DG, tiens, une série).

Mon rapport à ce chef-d’œuvre – « en regardant la mer, vous n'aurez pas de sensations aussi fortes qu'en écoutant La Mer »*** - est ambivalent car autant j’en ai toujours apprécié la limpidité, les coups de pinceau impressionnistes, la puissance maîtrisée, autant l’absence d’épine dorsale, sans me déranger en soi, n’a jamais trouvé de compensation sous une forme de guide, quel qu’il soit. Et puis paraît ce sublime disque que j’acquiers avant tout pour la 2ème Symphonie de Mahler où l’Archange Claudio réussit à créer un fil conducteur en amenant chaque musicien, je devrais dire chaque soliste, à toujours être symbiotique avec l’autre, par des jeux de couleurs ou d’énonciation de la note, un dialogue polyphonique luxuriant, un rayonnement cuivré, qui illustre d’une puissance émotionnelle incontrôlable l’Eté Indien de celui qui, sans raison objective, est sans doute le chef – ou bien est-ce l’homme ? – qui me touche le plus dans le petit monde des directeurs d’orchestres.

Dans les diverses configurations testées, on note toujours une contingente épaisseur des traits et une large zone médiane basse imperceptiblement complaisante, voire charnue, respectant néanmoins la belle exploration des teintes, ainsi qu’un lien permanent entre les lignes flexibles interdisant toute forme de silence qui ne soit musical, pâtissant toutefois du corollaire de gommer (mais si peu) la transparence diaphane voulue par le chef et que seul un orchestre de ce calibre pouvait réussir.

Au risque de déplaire, la lecture du fichier rippé en wave (cf la procédure de test en introduction) soulève partiellement ce voile léger face à la lecture directe, moins incisive et nerveuse, plus opaque.

 

Attention à bien déchiffrer nos analyses : le constat précédent d’une lecture plus ouverte, précise et nuancée par un lecteur réseau vaut par l’Antipodes ou équivalent. Soit une combinaison haut-de-gamme.

Le même essai en passant par un brave petit Node 2 de Bluesound tourne en faveur de la restitution par la mécanique CD du Blu MkII, plus nourrissante. Ceci étant, l’écart n’est pas bouleversant. A partir d’un fichier équivalent au CD : 16/44.

Par ailleurs, avec toutes mes excuses, je suis en train de tomber dans ce qu’il y a de pire dans les essais hifi : mélanger le jargon technique à celui du ressenti. La complexité du système écouté m’y contraint.

Blu MkII CHORD 3
                                                                    

TIMBRES

- lecture CD Up-scalée + Dave

DIAMs 3 OR 1 ORANGE

- Dave seul par fichiers

DIAMs 5 ROUGEs

- Dave + Blu par fichiers

DIAMs 5 OR

EQUILIBRE TONAL :

- lecture CD Up-scalée + Dave

DIAMs 3 OR

- Dave seul par fichiers

DIAMs 4 ROUGEs

- Dave + Blu par fichiers

DIAMs 4 ROUGEs

Pas facile à comprendre, n’est-ce pas ? Qu’y puis-je, nous avons choisi un code couleur par catégorie de prix, donc je considère différemment les éléments séparés et les éléments réunis.

Et – nous ne le répéterons jamais assez -, ayez bien en tête qu’il est difficile de choisir nos diamants entre perception dans l’absolu et perception relative. Ici, je crois que je suis davantage dans une estimation « relative ».

 

SCÈNE SONORE :

Profondeur et largeur de scène sont spectaculaires sur l’incommensurable version de La Mer par Abbado ci-dessus, une profusion tenant en partie à la séduction par l’équilibre spectral déjà mentionnée qui nourrit une ampleur particulièrement agréable, celle que les amateurs d’une certaine idée de l’analogique réclament prioritairement ; en dépit d’un léger déficit d’aération. Peut-être.

Un grand son, en quelque sorte… sans le moindre décrochement ou perte de cohérence sur les forte d’orchestre.

Cette prodigalité est-elle dispensée au détriment de la justesse des placements ? Non. La taille de l’abdomen est accentuée, soit, mais sur la pertinente intégrale des Quatuors de Schubert par les allemands de l’Auryn Quartett (enregistrée de 1995 à 1997 pour CPO, à l’heure actuelle encore une de mes références) dont une sublime version du farouche D810 (vous voyez ? La jeune fille qui, sur une anacrouse, refuse au squelette venu l’enlever de la toucher. Bien avant « Me Too »), le respect de l’espace où les interprètes posent l’anathème est remarquablement charpenté.

Ce disque originellement CD et rippé en wave confirme cette fois encore que la lecture « dématérialisée » est un rien supérieure en timbres et diversités à celle du disque en direct, mais en ce qui concerne la précision du placement de chacun et la plausibilité des dimensions, aucun mode combinatoire ne prend le dessus. En revanche, le spectacle lu via l’Up-Scaler devient plus précis, les cordes plus tendues, et l’humble noblesse du quatuor dans ce moment d’anthologie est surlignée d’une paisible plénitude prolixe. Si la douceur des boisés est toujours « magnifiée » par l’onctuosité analogique caractéristique de ces objets, elle est cependant mieux concrétisée.

Même constat sur un autre style (mais toujours intégralement teuton) : « Silence is Sexy » d’Einstürzende Neubauten (eh oui, j’ai mes obsessions), là encore issu de CD mais en flac, non compressé s’il vous plait.

La solidité des placements, la sensation de présence sont franchement sidérantes sur l’ensemble Chord, plus floue et un peu moins matérialisée en lecture directe, soit, mais quand même quel show, quelle intimité !

C’est lorsque que Blixa Bargeld allume sa clope ou nous souffle la fumée de cigarette à la gueu… figure que l’écart entre les différentes combinaisons se précise, toujours au profit de la même : fichier sur Dave + Blu.

La dimension physique est à la limite de la pantomime surréaliste, envahissant l’espace, le groupe de musique bruitiste expérimentale industrielle, politiquement engagé, s’invite incontinent dans votre salon, avec un aplomb sidérant par l’entremise des Chord. La voix charpentée et expressionniste de Blixa pourrait tourner un peu sépulcrale ici, mais bon sang quelle incarnation ! La longueur des notes de la basse du moustachu balèze (Alexander Hacke) descendu de sa bécane (une Harley ? Il a le physique pour !), une fois enfouie dans les tripes ne vous lâche pas une seconde. Et la sensation des métaux et plastiques des percussions imposent une scénographie diaboliquement tenue par l’ensemble comme par les éléments séparés Chord. La montée des idiophones sur le dernier tiers (fabriqués par le groupe avec du matos de récup, rappelons-le) se développe en progression constante ne décrochant jamais de la plausibilité dynamique.

- lecture CD Up-scalée + Dave

DIAMs 5 ORANGEs

- Dave seul par fichiers

DIAMs 6 ROUGEs

- Dave + Blu par fichiers

DIAMs 5 ORANGEs

 

RÉALISME DES DÉTAILS :

 

L’écoute des Quatuors de Sofia Gubaïdulina par le Quatuor Molinari (Atma, 2015) est gourmande, le phrasé permanent, et la distinction des recherches de couleurs par des musiciens très inspirés tout à fait magnifique !

Cependant, l’exercice est équivoque et ce dès le Premier Quatuor (écrit en 1971), tout en mystère et locutions évoquant çà et là des pattes d’insectes, la nuée de créatures fantomatiques ou de pétales de songes dans le vent, entortillées dans une écriture qui semblent relever de métissages aléatoires : certes, la prise de son n’est pas parfaite mais on sait pouvoir espérer, sur les murmures inquiétants, chuchotements et énervements des spectres enhardis, une lisibilité plus congruente des filigranes aux creux des nuances, des vaguelettes en sourdine, ainsi qu’une notion plus aboutie des silences environnants.

Autre forme d’énergie dans cet indéfinissable machin qu’est Necroscape, échappé d’un laboratoire malaxant biologie, poésie, multiculturalisme, sorcellerie et thaumaturgie – impossible jonction de Brian Eno, Björk et Behemoth - qui porte le nom limpide de tētēma. Le pandémonium nous engloutit entre des séquences ambient, polyphonique ou polyrythmique mystiques - incluant des créations sonores aériennes superbement agencées - et les jets d’acier d’une usine de Metal Experimental cramponnés alors à la puissance de locomotive d’un batteur à toute vapeur (et pourtant inventif). Ce caléidoscope peut aussi emprunter divers chemins de ballades délurées ou chamaniques, exotiques ou bucoliques (ça dure peu) mais toujours aussi habitées d’une étrange démence transcendante. Alliance rebelle d’Anthony Pateras et Mike Patton qui s’adjoignent les services (très enrichissants) de Will Guthrie (le batteur/locomotive) et Erkki Veltheim (violon et mandoline mais aussi programmation des percussions), tētēma catapulte un ovni dont les relents métal en perturberont plus d’un alors que rien n’indique qu’il y ait la moindre guitare dans la transe !!!!

Exotique, ai-je dit ? N’oublions pas que ça désigne aussi un noyau atomique hors de la vallée de stabilité par la proportion en protons et neutrons… Donc instable.

Que nous apprend un tel disque totalement à l’Ouest ? Il est tellement volumineux, calaminé dans une charge alambiquée, que la lisibilité en devient abstruse ; d’autant plus que les artistes, volontairement ou pas, n’ont pas ciselé un relief interne à la production, une globalité qui engendre un besoin de définition acérée du lecteur pour ne pas devenir pur chaos.

Si l’ensemble Chord accompagne généreusement ce disque halluciné en procurant du corps qui compense partiellement l’imprécision des matières, on regrette de ne pas aller plus loin en transparence expressive, en lien direct avec le paysage cru et ses parfums, dussent-ils induire créosote, suie et fumée (en référence à la locomotive évoquée ci-dessus). Les attaques sont nettes et l’énergie certainement pas en retrait, ne confondons pas tout, mais la priorité donnée à la ductilité érode quelques enchaînements intriqués de griffures, ténuités et cambrures, floute la photo, pas tant par manque de piqué que de subtilité des modelés.

                                                                                                                                  

- lecture CD Up-scalée + Dave

DIAMs 4 ORANGEs

- Dave seul par fichiers

DIAMs 4 ROUGEs

- Dave + Blu par fichiers

DIAMs 4 ORANGEs

 

QUALITÉ DU SWING, DE LA VITALITÉ, DE LA DYNAMIQUE :

 

L’échelle des intensités dynamiques est scrupuleusement respectée sur l’assaut final du 3ème mouvement (In Ruhig Fließender Bewegung) de la 2ème Symphonie de Mahler par Ivan Fischer et le Budapest Festival Orchestra que j’ai choisie d’une part pour la spectaculaire prise de son – puisque, en dépit de la réalisation « très multi-micros » (et ça s’entend), l’extension dynamique est époustouflante - et d’autre part pour la réussite manifeste, très « dansante », de ce mouvement. Il n’est pas rare que l’image sonore se rétracte lors de l’impressionnante ascension finale, voire se tasse ; ici, absolument pas ; aucune sensation de palier non plus mais au contraire de remarquables effets de modulations internes.

C’est d’autant plus flagrant lorsqu’on lit la même version en fichier DSD natif (disponible chez Channel Classics) où les poumons de l’orchestre semble pouvoir dilater un dirigeable. Là pour le compte, le CD est définitivement enterré et paraît presque crapoteux. C’est dire. Ceci en passant par la combinaison complète évidemment.

 

Swing impeccable, accompagné d’un balancement chaloupé sur le bel album, pas génial hélas, de Kandace Springs, « The Wowen Who Raised Me » qui s’ouvre sur un efficace riff de contrebasse de Christian McBride (eh oui…) et laisse rapidement place à la voix dont la large étendue des moyens fonde la colonne vertébrale de l’édifice. Encore une reprise de « Strange Fruit » au milieu de l’hommage rendu par Madame Springs à ses muses ; les premières mesures rappellent Cassandra Wilson, mais rapidement la native de Nashville aborde un paradoxe désappointant : un arrangement sobre d’un côté (elle s’accompagne au Fender) et une démonstration vocale qui en fait trop de l’autre. Bon, indubitablement, l’organe est éblouissant d’aisance et virtuosité ; pour autant, la performance dessert l’intensité dramatique du texte. J’admets que le choix fonctionne sur la plupart des titres (dont « I put a spell on you » ou « Killing me softly »), mais m’agace passablement malgré tout… Le son de l’album, naturellement incarné et gravé en profondeur, convient aux éléments Chord, dont on aurait pu craindre que leur roborative majesté affecte swing ou groove, mais non, on est portés sans relâche par les sinuosités élégantes ou acrobatiques de la jeune femme.

Bref, le swing est dans leurs Chord.

……

Même pas honte.

… Passons. Et changeons encore une fois de genre avec un album de Flying Lotus. J’ai pensé à Flamagra (2019), mais me souvenant que ce dernier est clairement moins inspiré que You’re Dead ! (2014), et même ressemble à un réchauffé de restes épars, j’ai opté pour le flamboyant référent d’un immense artiste alors en pleine fécondité, sans doute si débordante qu’on ne saurait lui reprocher de n’avoir pas su la maintenir à niveau.

Etait-ce un retour au berceau familial ? Le producteur DJ rappeur Steve Ellison (FlyLo pour les intimes) s’éloignait de son univers radical de « beats » avant-gardistes pour s’engouffrer dans la veine d’un jazz rock ou fusion, fluctuant sur des torrents de notes de basse et pour le reste difficile à décrire tant les arrangements bouillonnant de chantournements éphémères et coloriés donnent l’impression de fuser dans tous les sens. A noter un morceau prémonitoire « Coronus, the Terminator », passage carrément flippant au regard des évènements actuels, alangui entre chœurs vaporeux, effleurant la dissonance, survolant un rythme gourd débouchant sur le gracieux et éthéré « Siren Song » avec Angel Deradoorian ; bien barré quand même… mais en contraste avec la majorité de l’opus, plus enfiévré et quasi éreintant par les jaillissements, croisements, empilages de couleurs et segments où chaque racine sonore semble avoir fait l’objet d’une maturation à la fois pointue et conçue dans une vision globale. « Never Catch Me » est possiblement le morceau le moins gonflé de l’album : nul besoin puisqu’il s’arc-boute sur la forte personnalité de Kendrick Lamar.

Les Chord déroulent l’exercice avec un panache d’autant plus enthousiasmant que la production est parfois un peu nébuleuse, au préjudice des éruptions créatives ; Blu + Dave, et surtout Dave + Blu (eh eh…) nous embarquent dans un univers rythmique agité, multiplement cadencé ou tournoyant, réussissant quand il le faut et où il le faut à nous placer hors gravité ou au contraire nous engluer les pieds au gré des 20 plages ahurissantes et aussi puissantes que la Kryptonite. Quelle qu’en soit la couleur. Même si, comme pour tētēma évoqué dans la rubrique « richesse des détails », on pourrait souhaiter une description plus incisive et approfondie dans l’inextricable magma…

 

- lecture CD Up-scalée + Dave

DIAMs 4 ORANGEs

- Dave seul par fichiers

DIAMs 6 rouges

- Dave + Blu par fichiers

DIAMs 5 ORANGEs

 

EXPRESSIVITÉ :

 

L’expressivité est-elle incompatible avec la recherche d’une « harmonie » permanente ? Les appareils Chord testés ici tendent à prouver que non ; on ne « vibre » peut-être pas tout à fait assez, nous pour qui c’est une obsession. Mais on vibre !

On ne s’est pas ennuyé une seconde avec ces engins, on a savouré de nombreux moments et c’est plus parce que nous connaissons quelques compétiteurs qui ont mieux su nous bouleverser que nous faisons la fine bouche.

Ces (très rares) compétiteurs n’offrent tout simplement pas le même dosage dans le cocktail compliqué qui vise à satisfaire les sens, l’intellect et le cœur… Un peu plus de ceci, un peu moins de cela.

Ainsi, par rapport à nos repères absolus (2 ?), manque peut-être le petit « je ne sais quoi » qui marque le pas entre un paysage sauvage dont l’énergie est aussi brute et vorace que celle d’un prédateur prêt à engloutir les innocents et les imprudents… et sa représentation grandiose.

Personnellement, si me font défaut la lueur ténue des frémissements fugitifs, la furtivité des murmures, le tranchant dans la chair, quelques éclats secrets, du fait d’un moelleux imperceptiblement stylisé par la douceur, je vivrais néanmoins volontiers avec ces éléments de la série Choral ; si possible réunis !

- lecture CD Up-scalée + Dave

DIAMs 3 ORANGEs

- Dave seul par fichiers

DIAMs 5 Rouges

- Dave + Blu par fichiers

DIAMs 4 ORANGE.2

 

 

PLAISIR SUBJECTIF

La suavité - que certains qualifieront d’analogique -, procure aux Blu et Dave un confort très appréciable parce qu’il n’est pas accompagné de mollesse mais au contraire d’une énergie très maitrisée qui pousse loin la « musicalité » de l’ensemble, et une capacité résolvante qui, au-delà de quelques réserves, place quand même ce couple dans le peloton de tête des machines de lectures actuelles. Une résolution voulue un peu chaude par les concepteurs qui ont réussi un délicat équilibre entre précision et agrément.

D’une haute-technologie pensée pour durer, les lecteurs Chord peuvent représenter un choix de long terme, notamment en prouvant à ceux qui estiment que « le numérique c’est froid et chirurgical » qu’ils ont tort.

                          

- lecture CD Up-scalée + Dave

DIAMs 5 ORANGEs

- Dave seul par fichiers

DIAMs 6 ROUGEs

- Dave + Blu par fichiers

DIAMs 6 ORANGEs

 

RAPPORT QUALITÉ/PRIX

 

Ouais, bon. Pas cadeau tout ça.

Et pas simple puisque c’est une combinaison alambiquée. Sans le Dave, le Blu n’est rien.

La combinaison totale avec les éléments de rack avoisine les 26 k€…

Le DAC Dave est proposé à un prix parfaitement justifiable, par la technologie et un comportement musical un tantinet typé mais élégant.

Après se pose la question du Blu. Si vous êtes accrochés à vos chers Compact Discs, rien à dire, le gain que permet la fonction Up-Scaler justifie sans aucun doute l’acquisition.

Mais pour ceux qui ont basculé dans le camp de la « démat », le coût du Blu pour sa seule fonction Up-Scaler est évidemment problématique ; alors que l’apport est franchement le bienvenu.

Si vous pouvez, allez-y. Ou alors signez une pétition pour demander à Chord de sortir un Up-Scaler seul !


Dave

DIAMs 5 ROUGEs

Blu

??????

Blu + Dave

DIAMs 3 OR 1 ORANGE

* j’en profite pour exprimer une petite irritation : autant le player Roon est excellent en performances sonores, autant, contrairement à beaucoup, je trouve l’interface et la gestion des fichiers très agaçants du point de vue mélomane en voulant se mêler de tout sans être un seul instant intuitifs.****

** pour info, alors que j'écris ces lignes, je viens de repenser à une autre version récente, passionnante, vraiment audacieuse par Joahn Dalene, sortie fin 2019.

Même si personne ne parvient à la cheville, côté défi, de la mutine naturelle Patricia Kopatchinskaja, accompagnée - en l'occurrence avantageusement - par l'outrecuidant et néanmoins novateur Teodor Currentzis et son orchestre inféodé pas forcément toujours à la hauteur. Peu importe, la gouailleuse moldave doit faire se retourner si souvent Piotr Illitch dans sa tombe que, à la fin, il finit par sourire, avec gratitude, de celle qui, par sa "reprise", le rend immortel.

*** Sviatoslav Richter

**** zut, faudrait que je donne des explications techniques.

DAVEBlu MkII CHORD 1

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