à l’oreille





Atlantis Lab AT21 Pro + Sub AT33
Une autre enceinte, assez Sub-Lime

Par LeBeauSon - Juin 2022


Perception d’ensemble

Le Sub AT33 d’Atlantis Lab ajoutée aux très appréciables AT21 peut être perçu de mille manières : une encombrante verrue, une baudruche visant à déclencher un feu d’artifice onaniste pour les complexés ou :

Le moyen d’élever une enceinte dotée de qualités déjà exceptionnelles vers un firmament musical en marge des normes paresseuses de la haute-fidélité, toutes gammes confondues.

La démonstration suppose la patience de décortiquer notre banc d’essai mais l’impatience est revigorée par l’envie, émise par le patron, d’estampiller la nouvelle enceinte issue du couplage AT21 + Sub AT33 d’un Diamant sur Canapé.

DIAMs 6 ROUGEs

Note préliminaire : je suis furieux.

Grincheux, on le sait ; furieux, c’est plus rare.

 

Je n’ai pas été approché par le site Lebeauson pour m’adresser à des hifistes obsessionnels, mais pour ouvrir l’appétit de la reproduction de la musique la plus sincère, la moins déformante possibles aux amoureux de musique pas forcément férus et encore moins maniaques de matos.

Or je constate que, de manière croissante, je suis contraint de prendre en compte des paramètres techniques qui risquent d’effrayer des primo-acquérant simplement et honnêtement attirés par l’idée de « vivre » la musique.

Raison pour laquelle, en dehors de toute considération « artistique », je n’étais pas si sûr d’avoir envie d’accrocher notre récompense majeure au poitrail 3 pièces (+ les pieds) de « l’enceinte combinée » AT21 + AT33.

Donc, pardon, pardon, pardon et appuyez-vous sur le savoir-faire de magasins chevronnés, comme vous le feriez pour organiser une installation informatique sophistiquée ou d’un menuisier qualifié pour poser les étagères dignes de votre discothèque.

Avec la même méfiance, dès lors qu’un spécialiste s’abrite derrière sa fausse compétence pour jeter des termes incompréhensibles afin de se justifier. Fuyez celui-là ! Cherchez-en un autre. Et achetez chez lui, s’il vous plaît.

NB : Code couleur pour ce banc d’essai : Orange (de 3 200 à 6 500 €) et Rose (6 500 à 12 000 €). Les AT21 Pro coûtent 3 200 € la paire et le Sub AT33 3 700 €. On est donc dans l’entre-deux…

AtlantisLab AT21Sub 3

Deuxième épisode de l’essai de l’enceinte compacte AT21 Atlantis Lab que nous avons grandement appréciée ici :

https://www.lebeauson.fr/a-l-oreille/246-atlantis-lab-at21-pro-concentre-de-vitalite-resolvance-et-serenite

Le fabricant français nous a en effet confié un caisson de grave, appelé Sub AT33. Le plus petit de sa collection. Initialement étudié pour étendre le potentiel, déjà élevé, de sa chère AT21.

Plus petit, ça ne veut pas dire petit…

550 x 530 x 530 maximètres

Et 55 kgs sur la balance. Super…

 

D’un autre côté je ne vais pas trop râler sur le format et je vous explique pourquoi : sans la moindre volonté irénique, je précise d’emblée que je déteste les caissons de grave. Ou plus précisément la plupart d’entre eux qui, par leurs dimensions réduites, ne peuvent prétendre émettre du grave que grâce à deux tricheries :

- pour faire descendre bas en fréquence un haut-parleur dans un petit volume, il faut que son équipage mobile soit lourd et pourvu d’un fort débattement.

- et pour prétendre résoudre l’absurdité relevant de la physique élémentaire, on insère dans l’équation des amplis puissants supposés compenser le rendement forcément faible du ou des HP, dont la courbe est, qui plus est, souvent corrigée par un processing, généralement via un DSP pour accentuer l’effet de grave artificiel.

Ampli puissant ne veut pas dire rapide ou tendu et, de fait, un haut-parleur dont l’équipage est lourd et contrait à de forts débattements est, comment dire ? Mollasson.

Alors bon certes, on lit çà et là que c’est le médium qui procure la perception de rapidité.

C’est ça oui… Et alors, la marmotte, elle met le chocolat dans le papier d’alu.

Pour déjouer l’ironie de la marmotte, le caisson AT33 Atlantis part d’un principe différent : il utilise frontalement un haut-parleur de grand diamètre (33 cm, ça commence à compter), rapide, qui ne descend pas forcément très bas en lui-même et est chargé dans un volume correspondant à ses paramètres électromécaniques, donc pas contraint.

Vous allez me dire : ben oui, mais alors il n’y a pas d’extrême grave ?

Non, vous ne le dites pas ? Tant pis je réponds quand même.

Si ! Et grâce à deux astuces.

- le haut-parleur n’ayant pas besoin d’émettre haut en fréquence, il fonctionne uniquement dans une partie du spectre où certes son rendement est plus faible, mais puisque son efficacité globale sur une zone plus large d’utilisation est superlative, la partie basse affranchie par le passe-bas vers 45/55 Hz reste d’une efficience relative élevée.

- le haut-parleur principal, comme sur l’ensemble de la gamme d’enceintes Atlantis Lab (sauf une), est soutenu dans l’extrême grave par un deuxième haut-parleur résonnant plus bas, de 26 cm ici, émettant très peu, placé dans l’axe à l’arrière du caisson à une distance précise pour s’auto-filtrer et débarrasser la charge d’indésirables ondes stationnaires.

Dans ces conditions (haut-parleur réactif et volume de charge important (on ne doit pas être pas bien loin de 120 litres)), je veux bien relativiser ma position sur les caissons de grave puisque celui-ci s’apparente alors une voie grave correctement accordée.

Le Sub AT33 est disponible avec et sans (je crois) amplificateur incorporé. Celui-ci est d’origine Atohm et délivre 500 W.

A ce stade de la description, j’ai un ggrrr de principe (ça faisait longtemps) : évitez d’utiliser des fourches si vous vous branchez en « haut-niveau » (bornes HP) :

- d’une part, essayer de les faire tenir relève de la pêche au lancer en se tenant debout sur le fil d’un funambule…

- et éviter le court-jus d’un pari au bras de fer contre un pilier de Rugby.

Encombrant, certes, ce caisson déjà volumineux a fort heureusement de l’allure. Reprenant la tranche en cuir noir et les flancs en chêne rainuré de la gamme AT, ses proportions passent bien. L’évent étant sur le côté droite, veillez à en tenir compte au même titre que les haut-parleurs avant et arrière au moment du placement.

AtlantisLab AT21Sub 4

Dans ma pièce d’écoute, pour diverses raisons, je ne l’ai pas installé idéalement. Là encore, on a beau dire qu’il n’y a pas de directivité en dessous de 150 Hz et que par conséquent on peut placer un « sub » n’importe où, l’expérience prouve que, en fait, euh… Non, pas vraiment : il y a quelques précautions minimales et il faut quand même envisager de devoir le déplacer de quelques dizaines de centimètres par rapport à l’endroit souhaité ne serait-ce que parce qu’on peut tomber pile dans une zone où un ventre - ou au contraire un creux - de longueur d’onde devient particulièrement problématique.

Dans ma pièce, je l’ai posté à droite de l’enceinte de droite. Notez que si je l’avais placé à droite de l’enceinte de gauche, grosso modo il aurait été au milieu. Donc bien placé. Hihi…

Le fabricant m’a dit : tu verras, avec le Sub AT33, l’AT21, ça devient une autre enceinte !

J’ai suivi ses instructions de réglages et euh… Ah ça oui, c’est une autre enceinte !

Mais pas sûr que je l’aime, celle-là !

Alors j’ai modifié deux valeurs du réglage en respectant les bases (-12 dB par octave et inversion de phase (180°). Autre réglage très intéressant, mais moins universel : -24 dB en baissant nettement la fréquence de coupure et en montant le niveau ! C’est limpide, non ? Demandez aux experts fielleux qui savent mieux que nous). Valeurs fignolées calmement pour vérifier à l’arrivée divers points intéressants.

Parmi lesquels : selon l’amplificateur et à réglage égal, le résultat peut varier pas mal et passer d’une combinaison parfaite à quelque chose de sympa mais quand même artificiel dans un autre cas de figure, notamment si l’ampli est un peu relâché, peu amorti ou que sais-je.

Nom de bon sang : je suis contraint d’entrer de plain-pied dans ce qu’il y a de pire dans la hifi, s’apparentant à l’obscurantisme de l’informatique.

Faites confiance à votre revendeur. Et donc, évitez les facilités de sites populistes.

Deuxième point : contrairement à quelques affirmations que l’on glane çà et là, la qualité des câbles, modulation ou HP comme secteur joue manifestement.

La rapidité, la tension, la souplesse de modulation sont aussi directement liées au comportement, pour ne pas dire la personnalité, de l’ensemble d’amplification « source », point à prendre sérieusement en compte.

Enfin, je n’ai pas de préférence particulière pour une liaison « bas-niveau » par câbles de modulation sur les amplificateurs intégrés ou préamplis qui le permettent, ou « haut-niveau » en repiquant le signal sur les bornes HP, le résultat dépendant vraiment des appareils employés.

La description de nos impressions d’écoute sera évidemment essentiellement inscrite dans des cadres où nous étions vraiment satisfaits.

Je vais reprendre l’essentiel des disques chroniqués pour l’enceinte AT21 seule afin d’expliquer ce qu’apporte le Sub AT33 et en quoi, en effet, elle devient une autre enceinte !

Matériel de test : Lumin U1, Metronome Technologie « le Player 3+ », Atoll ST300 Sig, Gato CDD-1, amplis Tsakiridis Aeolos Ultima, Serblin Frankie, Pré + amp Alef (excusez du peu), Accuphase E380, câbles Wing, Alef, Legato, Nodal, Mudra, Absolue Créations.

 AtlantisLab AT21Sub 5

RICHESSE DES TIMBRES ET ÉQUILIBRE TONAL :

Nous avions commencé le test de l’AT21 par Ravel, Gaspard de la Nuit, Jan Lisiecki, paru chez Deutsche Grammophon :

« … Si le piano « sonne » un peu creux, je gage que je paye là le tribut de ma pièce…  – écrivais-je – les harmoniques supérieures manifestent un chromatisme rayonnant, fuyant toute coalescence. Oui, l’instrument manque d’un rien de corpulence, mais la fluidité des intentions, des nuances d’un jeu de main droite plus perlé que ciselé, très aériennes, nous portent dans une nuée de grâce tandis que, indubitablement, quelques notes de la main gauche sont faiblement estompées ; on n’y attache guère d’importance tant on est comblés de beauté »

On ne sera pas surpris que le « son un peu creux » que nous regrettions ne le soit plus du tout dès lors que le Sub entre en action.

Le cœur matérialisé de chaque note du piano instaure au contraire une pénétration physique qui hausse obligeamment l’interprétation vers plus d’aplomb, de mystère ténébreux, alors que les timbres fleurissent, singulièrement enrichis par une occupation matérialisée de la pièce d’écoute, implantation sur le sol d’une colonne vertébrale renforcée par un exosquelette.

Le piano reproduit par la formule Atlantis Lab est un des rares cas où on approche de la gravitation réaliste d’un Steinway dans la pièce.

Comme quoi, il y a parfois des constats schizophréniques : l’apport maîtrisé de la gravitation par le Sub garantit sans aucun doute une élévation de gamme !

Et à plus d’un titre… Au point que, dès l’introduction, je n’hésite pas à le dire : sans considération de prix ; le résultat musical, éloquent de cet ensemble le fait rentrer directement dans le club très étroit de ces enceintes avec lesquelles je pourrais vivre.

Plaisir d’autant plus satisfaisant qu’on peut échelonner dans le temps l’achat des AT21 puis du Sub en ce qui s’apparente grandement à un investissement.

NB : Je recommande en effet d’investir dans cet ordre. Le Sub tout seul est un rien limitant. *

* C’est une blague !

 

Et croyez-moi, faire une fois de plus le panégyrique d’un petit fabricant m’énerve. Agacement certes pas orienté contre les valeureux petits concepteurs (encore que, quand on connait le degré de prétention d’une bonne part de l’artisanat français…) mais vers les bataillons de bureaux d’étude des majors infoutus de nous soumettre des enceintes enthousiasmantes, beaucoup trop souvent formatées pour flatter l’auditeur au détriment de l’éloquence des artistes.

Tiens… Encore un ggrrrr…

La Violetta (Traviata, Acte III) de Nadine Sierra, dans les extraits de sa compilation Made for Opera :

« AT21, tout en exhalant une multitude de parfums, prenant un soin particulier à dégager l’épanouissement multicolore de la soprano, préserve une forme de douceur - qui n’est certainement pas simplificatrice – en repoussant les possibles duretés sur la voix ferme, au timbre un peu bas, souvent caressant à défaut d’être moelleux.

Je trouve l’orchestre parfois un peu pauvre, mais on sent que la Dame veut donner de du cœur et de l’implication à chaque instant pour illustrer la beauté et la fragilité des héroïnes.

Est-ce totalement convaincant ? Non.

Est-ce beau ? Oui. »

Via la nouvelle combinaison, le rendu est incontestablement toujours beau et ne change guère la perception de l’approche de la noble américaine refusant la marginalité ; mais il aposte une réviviscence de l’artiste et plus notablement encore un nouveau rôle à l’orchestre, l’extrayant du sfumato, l’ennoblissant d’un relief plus impliquant, de textures plus convaincantes, combles…

Proéminence interne des substances sonores, lien plus organique mais aussi meilleure compréhension de l’acoustique de la captation.

Certes après avoir patiemment mis au point les réglages sur une combinaison pointue !

L’enjeu le mérite indubitablement : inclure le Sub AT33 ne fait pas que corriger quelques faiblesses natives d’une AT21 : on a clairement affaire à une nouvelle enceinte – comme le revendique le concepteur - et elle creuse l’écart avec son positionnement de prix même en incluant la nécessité induite de câbles de qualité !

Brahms maintenant, le second sextuor à cordes, Op 36, Quatuor Belcea, Tabea Zimmermann et Jean-Guihen Queyras

« … Mais à la ferveur du Quatuor formé à Londres et de leurs amis, s’ajoute une lisibilité qui fignole la richesse de la partition de chacun, que ce soit dans la délectable mélancolie du début du troisième mouvement ou dans son soudain basculement enjoué où les textures peuvent vite se confondre, particulièrement dans les modulations internes du contrepoint.

 

Toutes facettes suivies aisément par l’AT21, certes sur le prodigieux (disproportionné ? Pas sûr) ensemble Alef. On note toutefois que la différentiation – nette - des matières se fait par le piqué des pigmentations plutôt que par le grain, d’autant que la captation ne brille pas non plus par son relief. Ajoutons dès maintenant que, tout en restant sur cette sensation d’un rendu « léger » (pas évaporé quand même, loin de là), on est bluffés par un dosage accompli entre minutie micrométrique des teintes et malléabilité ! »

La contribution d’une matérialisation burinée des textures, des boisés, vient fourbir de plus d’intensité l’éventail pourtant déjà fournie des pigmentations diverses.

Ici, la perception du jeu n’est pas changée, mais l’intimité avec les musiciens, par une invitation à rompre la distance sociale, à pénétrer dans leur monde, nous expose à un échange direct avec leur personnalité ; sur l’Accuphase E380 pour ce drôle de voyage en musique.

Je précise ce point car un de mes partenaires d’écoute, un jeunot (bon, 36 ans au compteur) incapable de la moindre complaisance et totalement étranger à la diplomatie, a boudé le Sub jusqu’à ce moment où enfin il a accordé son imprimatur.

Acceptation confirmée haut la main en retournant aux électroniques Alef !

Équilibre tonal : 

 

 

Il peut atteindre " DIAMs 6 ROUGEs " du moment qu’on ne se laisse pas aller à des réglages de novlangue hifiste.

 

Richesse des timbres :

DIAMs 6 ROUGEs

 

 

Même commentaire…

 

AtlantisLab AT21Sub 1

RÉALISME DES DÉTAILS :

Ce qui conduit au besoin d’enchaîner sur la notion de transparence avec un lien tout trouvé par le début de Jagden und Formen (Wolfgang Rihm), Symphonieorchester des Bayerischen Rundkunks dirigé par Franck Ollu.

« L’AT21 se rit des chausse-trappes tendues par ce type de musique qui ose tout en termes de complexité harmonique, déstructuration des matières, éclatements organiques.

Déjà en évitant les duretés qui pourraient vite surgir de l’acidité voulue par certaines prouesses harmoniques, par l’incision tendue des attaques de notes, et les jaillissements violents d’éruptions orchestrales se déchaînant à l’envi.

 

Le paradoxe déjà évoqué est ici flagrant : le pouvoir de résolution « optique » de l’AT21 est particulièrement élevé alors qu’on ne peut pas à proprement parler de piqué, et même regretter par moment la timidité des reliefs des textures. Les boisés arborent des couleurs, soit, mais pas vraiment de fibres, de granulation »

La dimension de l’œuvre s’embellit de profondeur, aussi bien visuelle qu’organique ou, mieux encore, qu’expressive.

Là aussi, afin de ne pas se vautrer dans la béatitude, on ne bouleverse pas la perception de l’œuvre, on n’entend pas réellement plus de chose en termes d’informations musicales. Simplement on « décérabralise » quelque peu la perception par une incarnation physique des jeux de substances tout autant que des timbres. L’œuvre en devient possiblement plus facile à aborder, par des impacts plus structurés, une prolongation des notes plus prenante, une intégration à l’essence de l’œuvre plus naturelle.

 

En fait, si : on entend plus de chose par la combinaison des variétés de matières, composante essentielle d’une importante portion de la musique contemporaine.

 

Au temps pour moi ! On passe de la perception de détails ou informations à des composantes frémissantes d’attributs qui nous extraient définitivement d’une perception plus ou moins complétée de cognition pour nous permettre d’atteindre ce moment rare de la complicité connectée à une forme abstraite d’art.

 

Nous ne connaissons pas des tonnes d’équivalent à ce genre d’expérience, en tenant bien compte que l’ensemble alors utilisé commence à frôler des sommets (les électroniques Alef). Pour autant, l’AT21 + Sub 33 ne se dérobent pas devant le défi de la tropopause.

« Tout passe avec une grande agilité et compréhensibilité et en cela on sent clairement la vocation de monitoring de ces enceintes, outil avec lequel l’ingénieur du son doit pouvoir travailler des heures entières sans fatigue en ne passant pas à côté de la plus infime information « technique ».

 

Là surgit un bémol intéressant car il nous oblige à un pas en avant : commencer à creuser l’expressivité plus tôt que prévu.

Mmmmhh… Tout bien considéré, c’est fait depuis le début du test.

Sans conteste, le couple AT21 + AT33 préserve l’étrange douceur « analytique » de l’AT21 mais, ajoutant des effets de différenciations vibrantes des matériaux, il guide si directement vers le cœur de la musique qu’il peut possiblement déconcentrer l’ingénieur du son précité.

On est en effet embarqués dans des notions de climats, de foisonnements volubiles, de pétillements incrustés dans l’espace qui compromettent de façon plus émotionnelle, plus intime, notre rapport à la musique.

Attention : au risque de me fâcher avec le fabricant et quelques revendeurs peu scrupuleux, j’insiste sur le constat que l’ajout d’un caisson de grave, aussi efficace soit-il, n’est pas une baguette magique. Ce serait mentir de prétendre que : « il n’y a qu’à ! »

Non, non et non ! Il y a eu des combinaisons où l’ajout du Sub AT33 était contre-productif, bancal, à la rigueur impressionnant mais aussi totalement grotesque, improbable en termes d’équilibre tonal dynamique, d’envahissement incongru des harmoniques, de toniques mal placées sur des mains gauches de piano ou des contrebasses aussi obèses que des montgolfières. Sans parler de goitres monstrueux sur des musiques à priori pensées pour ce genre d’excès, électro, hip-hop, trap et j’en passe, car il y a un moment où l’excès d’androgène devient crétin, épuisant, de l’ordre du crime et engendre des guerres.

On peut certes dès lors considérer que les électroniques en question sont incriminables, mais je ne crois pas que ce soit aussi simple. On est plus que souvent dépendant de phénomènes de comportement liés à des choix de conception, facteur d’amortissement, contreréaction, philosophie des étages d’entrée ou de sortie n’autorisant pas à se contenter d’un pointeur Bon/Mauvais pour déterminer la possible incompatibilité.

D’autant moins que, ce que nous, chez El Sonido Hermoso, considérons comme des aberrations, comblera d’extase lubrique les adorateurs d’un divin simulacre.

L’insertion d’une telle prothèse peut par conséquent tout aussi bien s’apparenter à la magie qu’à un furoncle.

Pour cette raison, autant je disais précédemment que je pourrais vivre avec « cette » enceinte, autant je ne la préconiserai pas au boss comme instrument de travail.

Tandis que, n’en déplaise à Eric (l’éminent concepteur), le Sub peut hisser les AT21 plus haut que son actuel Porte-Drapeau (Flagship en français) AT31 (soit, celle que nous avons testée n’était pas câblée par Esprit) à condition d’une mise en œuvre nettement plus pointue là où, somme toute, les AT31 sont faciles à installer, à nourrir. D’accord, l’AT31 extraira des pépites d’informations subsidiaires dans le médium (eh oui, c’est technique), mais la plénitude voluptueuse, l’homogénéité du développement des timbres comme des matières peut possiblement procurer un bien-être musical plus immédiat via la combinaison AT21 + AT33.

Je reconnais que j’en suis le premier stupéfait.

Dynamite de Stina Nordenstam.

 « … curieux titre pour un album mixé dans l’écosystème ennuagé de la fumée d’un feu de bois au cœur d’un chalet douillet enfoui dans la brume glaciale d’un Fjord en hiver…

 

…La tendance au détourage des silhouettes de l’AT21 délinée une réjouissante lisibilité des articulations si touchantes de la voix, des habiles décrochements de poignet sur la guitare, des appuis à fond de tempo d’un batteur à fond dans le ton, l’ambiance poisseuse et pourtant si belle de cette production unique. »

En pure qualité d’expression sur un tel moment, l’apport du Sub AT33 n’est pas flagrant, sachant toutefois qu’il complique délicieusement des effets de perspectives, fructifiant plus encore l’ambiance d’une sorte de hammam musical, et soutenant mieux encore le groove assez exceptionnel, les enfoncements de tempo d’un album qui, l’air de rien, est un immense moment de musique.

DIAMs 5 ROUGEs

AtlantisLab AT21 3

SCÈNE SONORE :

BENEE : Lychees

« C’est efficace, gros son bourré de peps et d’un certain sens du swing… »

« la 3D est à la fois impressionnante et cohérente, même si l’énergie aisément délivrée devrait avoir une meilleure implantation dans le sol, s’enraciner plus profond. Les effets de placement au mixage sont incontestablement pointés, positionnés mais avec une petite tendance à la dérive autour d’un point fixe, ballons reliés au sol par une courte ficelle oscillant d’un rien sous la caresse d’un vent léger, définissant en revanche admirablement les atmosphères. D’ailleurs, il y a de l’air entre les instruments, ce que tous les disques préalablement écoutés ont raconté unanimement.

 

L’entrain de la Neo-Zélandaise est communicatif et sa vigueur formellement transmise quand bien même les AT21 ne cognent pas vraiment, sauf à monter le niveau. Je veux dire, on n’est pas dans l’uppercut au bide, toujours surpris de ce paradoxe d’une vitalité et précision des enveloppes ne procurant pas exactement du punch.

 

On se doute, sur un tel disque, que l’extrême grave manque de profondeur sans la moindre frustration car le haut-grave est fourni, pousse proportionnellement avec un sens notable de l’articulation. »

Lorsque l’intégration du Sub AT33 est mitonnée aux petits oignons, le gain sur ce genre d’univers alimentaire est patent.

Par l’énergie viscérale transmise au bide, oui, soit, et là il ne faut vraiment pas se rater côté réglage, mais surtout par les fondations implantées profondément dans le sol, accompagnées d’une rectitude de placement aussi inamovible que les seize pièces sur l’échiquier avant le début de la partie.

Utiliser ce genre artistique (euh, si peu la plupart du temps, je parle de la R&B alternative de la Néo-Zélandaise) pour régler un caisson de grave c’est risquer de céder à la tentation du « trop », parce que, sans aucun doute, l’AT21 hippopotamisée par AT33 peut soudain se transformer en gros machin de sono qui déchire sa race avec autant de tact que le Monstre du Docteur Frankenstein en mode bipolaire. En moins humain.

Attitude fatigante et crétine : toute musique doit être respectée. Même si elle est calibrée prépubère.

Passons à la BOF (pas trop beauf, c’est pas du Hans Zimmer) du film Life, captation artificielle et magistrale d’un vaste orchestre et divers trucages, où la profondeur de la scène peut virer vers l’insondable si le positionnement des enceintes est approximatif. « … Souplesse et élégance. Deux parfaites expressions du caractère surprenant de ces enceintes. Certes le placement des musiciens au sein des pupitres n’est pas complètement verrouillé et les débordements du grave (sur le fichier) pas tout à fait intégrés ; qu’importe : la majesté, la somptuosité y compris dans des débordements spectaculaires, magnifient la capacité à aposter les évènements sonores jamais perturbés par un déséquilibre de tonalité ou densité.

L’AT21, outrepassant ses petites faiblesses, est l’enceinte de tous les spectacles» – disions-nous.

De fait, quand l’AT33 s’en mêle, il assène la possibilité d’une tempête en live garantie, alors que le spectacle peut tout aussi bien – et simultanément - être celui d’une délicieuse intimité.

Désormais, la mise en scène est de l’ordre de l’incommensurable impalpabilité intergalactique quand les assauts de frayeurs sont aussi névrotiquement tangibles qu’un Alien de Ridley Scott s’invitant dans votre chambre à coucher malencontreusement verrouillée à double tours. De l’intérieur.

On est dans le très haut Video Game.

Pardon : très haut-de-gamme de l’audio !

On constate en effet ici une sorte de paradoxe nous amenant aux limites de ce que nous tolérons ou rejetons. Le show proposé par la combinaison Atlantis Lab réussit flegmatiquement ce que nous détestons en grande partie chez Wilson Audio, par exemple, pour un prix nettement plus mesuré et, somme toute, une esthétique visuelle moins moche.

J’attends avec impatience que Wilson Audio - grand inspirateur de nombreux concepteurs (dont Atlantis) - me prouve que j’ai tort.

Scène sonore :

DIAMs 6 ROUGEs

 AtlantisLab AT21 2

QUALITÉ DU SWING, DE LA VITALITÉ, DE LA DYNAMIQUE :

4e Symphonie de Shostakovitch par Bernard Haitink avec le CSO publiée en 2008.

« Toutes formes de dynamique respectées avec soin et sérénité par la vaillante enceinte française, alors qu’elles sont passablement outrées dans cette lecture. Aucune perte d’homogénéité dans ce déluge de dissemblances, y compris sur les passages les plus ténus qui ne souffrent pas particulièrement de l’étoffe un poil éthérée de l’AT21 ; le seul regret concernera le retrait du grondement des contrebasses à l’approche de la coda.

 

Nous sommes emportés dans un festival de demi-teintes et de diaprures éblouissantes, faisant oublier que les textures pourraient être plus profondément imprimées. »

Pas difficile de supposer que les deux infimes réserves sont balayées par la mise en place du Sub.

Contrebasses ronflantes, soit, mais principalement une si précise perception viscérale des matériaux, de l’atmosphère, que la perception de l’œuvre gagne grandement en arcanes et poésie, révélant un aspect rarement perceptible à ce degré d’imprégnation : le talent du Maître néerlandais à scénographier les substances et le grain.

C’est absolument somptueux et rajoute encore à la grande classe de la restitution des AT21 pilotés alors par un ensemble Alef de compétition. Oui, encore lui.

Fiona Apple : The Idler Wheel Is Wiser Than the Driver of the Screw and Whipping Cords Will Serve You More Than Ropes Will Ever Do.

« … le début de Left Alone, composé avec un rare sens du rythme pour des percussions acharnées sera confirmé dans le développement foldingue du morceau : un sens du balancement déhanché de haut vol atteint sans pesanteur ni faussement de tempo par AT21 !

Soit, le grave - galbé - s’effaçant sur quelques notes et le grain estompé, ne parviennent pas à franchir le cap d’une idéale expressivité tout comme le côté frémissant du sourire cynique et accrocheur dans la voix jamais loin, certes.

Cependant que les ondulations du vibrato comme la perception des peaux excellent, racontant une histoire que peu d’enceintes tolèrent. Cette contradiction m’énerve fondamentalement pour ce qu’elle représente de difficulté à décrire. »

Voilà : c’est corrigé avec le Sub.

Sans que je sache précisément analyser comment et pourquoi, le complément, pourtant en apparence faible, déposé par le Sub assure aussi bien à la voix qu’aux musiciens un supplément d’âme, possiblement parce que ce qui faisait défaut à la longue liste des superlatives qualités de l’AT21, une sensation organique, un lien charnel, est ici sustenté par un diététicien compétent.

DIAMs 6 ROUGEs

 

 

 

EXPRESSIVITÉ :

Ce qui va de fait nous amener à revoir complètement le chapitre de l’expressivité.

Commençons par la compilation de Peter Gabriel parue en 1990.

« Autant sur la vibrante ode à l’amitié « opératisée » par Kate Bush et Peter Gabriel ou l’offrande ultra poétique piano/voix de Here Comes the Flood, prière infiniment poignante d’humanité, on attend une incarnation plus vibrante, la voix grenue de l’Archange plus râpeuse et celle de Kate (Don’t Give Up) plus troublée, suppliante, les notes de Fender plus distendues entre toucher et vibrations surnaturelles»

On bascule au contraire dans le monde trop rarement atteint, voire simplement effleuré par une part majeure de la haute-fidélité, quel qu’en soit le prix !

Puisque ces deux moments deviennent totalement bouleversants de sensibilité, d’humanité proposée par des acteurs résolument impliqués aussi bien dans leur art que dans le texte.

« Par l’entremise de AT21, Fast Cycle de Nico Muhly par James McVinnie (Orgue), pièce hautement passionnante, illustre sans aucun doute la virtuosité de l’organiste mais élague aussi les foisonnements cachés qui en fondent la puissance mystique. AT21 nous accompagne avec bienveillance dans un pan de la proposition, tout en ne nous laissant pas tout à fait pénétrer dans l’autre »

Encore une preuve intéressante qu’on peut vivre une perception différente d’une œuvre en variant un élément de sa chaîne de reproduction : la puissance mystique prend même le pas – avec le Sub - sur la virtuosité et, de démonstrative, la musique bascule soudain vers l’interrogation métaphysique.

L’expérience est passionnante et d’autant plus décontenançante que, en s’amusant à couper les enceintes pour ne laisser que le caisson, on n’entend quasiment rien ! Il faut poser les doigts sur la membrane pour être absolument sûr qu’il est en route.

L’AT33 confirme incontestablement un point commun des productions du fabricant français Atlantis Lab : propulser ses productions bien au-delà de leur prix, avec le corollaire que la mise en œuvre est à la hauteur des performances musicales.

Je l’ai exprimé plus haut, mais j’ai besoin de le répéter : ce constat m’énerve grandement et j’en veux terriblement à la grande industrie et ses moyens hyperboliques de ne pas être foutue d’approcher un tant soit peu du « bricolage génial » de quelques artisans dont on se demande parfois même ce qui a pu exciter leur imagination créative.

J’en suis à la fois satisfait et désolé pare que ça donne l’impression qu’on se fait manipuler dans bien d’autres domaines par une technologie triomphante.

Je sais bien que c’est loin d’être généralisable. C’est une des beautés de la hifi : je vois mal un bricoleur fabriquer une I.R.M. de pointe.

Tout ça me renvoyant vers une colère personnelle : majoritairement, la haute-fidélité, c’est de l’arnaque, en cela qu’elle méprise la main qui la nourrit : la musique.

Will you bite the hand that feeds you ?

Oh oui…

Une note ?

DIAMs 5 ROUGEs

 

 

 

PLAISIR SUBJECTIF :

A ce stade du banc d’essai consacré à l’AT21 seule, je soulignais combien le rapport aux astuces de production, minutie du travail lors des séances de mixage engendrait un plaisir inattendu sur des disques parfois oubliés.

La relation de chacun à son plaisir à l’écoute de l’enceinte AT21 + Sub AT33 peut revêtir des formes variées, puisque, comme expliqué à longueur de lignes, on peut aussi bien guider ce sous-ensemble vers un raffinement sensible et sensuel à même de combler des mélomanes pointus vers un sommet de délices que basculer vers le côté racoleur du « trop » si souvent proposé par la hifi haut-de-gamme, comme si elle présupposait que les gens qui ont du pognon ont forcément un goût de chiotte côté musique.

Faut reconnaître que le succès du Phantom of the Paradise ne vient pas démentir la statistique. Mais quand même…

Je me suis amusé à nous faire écouter quelques disques qui, théoriquement, ne craignent pas qu’on en fasse trop en choisissant un réglage qui en fait trop.

Un concert de Beyoncé. Bon, là, soit, le côté sono mal réglé où tout dépasse le colossal pour atteindre l’apocalyptique est rigolo. Deux minutes.

Puis un concert de Van Halen, Right Here, Right Now et l’enchaînement de l’hallucinant solo d’Eddie Van Halen 316 (Eruption) et d’une reprise décapante - même sans David Lee Roth - de You Really Got Me, en 1993, poussant musicalement les Kinks du côté de la K-Pop de BTS. (Clin d’œil au boss et ses ados. Comme quoi il a du boulot)

Typiquement, on est content du rôle joué par le Sub AT33 sur ce type de live, qui vient bienveillamment compléter l’ambiance concert, imprimant du relief par exemple à la guitare complètement folle d’Eddie, qui semble se rire de toutes les difficultés d’un solo ardu sans se prendre au sérieux à aucun moment mais dans une totale communion avec son public.

Ceci à une condition : que le caisson soit réglé sur la base qui nous a servie pour nos essais. Aucun intérêt de vouloir en monter un peu le volume sans que la rythmique devienne incompréhensible pour ne pas dire désagréable, gonflant bêtement la batterie d’Alex, le frangin déjà bien baraqué.

La vraie question reste posée : peut-on envisager le même Sub AT33 Atlantis Lab avec d’autres enceintes, de la marque ou sans lien de parenté ?

Je suppose facilement que oui. Mais, que voulez-vous, la déontologie impose des limites.

DIAMs 6 ROUGEs

 

 

RAPPORT QUALITÉ/PRIX :

Vraiment ? Vous posez la question ?

 

AtlantisLab AT21Sub 2

Banc ecoute