à l’oreille





MBL C31, série Cadenza
Chevalier teutonique ; en tutu

Par LeBeauSon - Novembre 2021


Le lecteur d’entrée de gamme de la prestigieuse marque allemande MBL n’est certainement pas une proposition au rabais.

Sa santé de fer alliée à une forme de raffinement d’aristocrate prussien, son sens des couleurs éclatantes mais jamais aveuglantes constituent de solides raisons de s’intéresser à cette machine qui ose prendre la musique en main, l’imposer sans se complaire dans de factices indulgences.

Une bonne surprise qui donne le sourire !

DIAMs 6 rouges

NB : Code couleur de nos diamants pour ce banc d’essai : Rose (6 500 à 12 000 €).

Prix du MBL C(adenza) 31 : 7 000 €

MBL C31 4
 

Si l’on est un tant soit peu audiophile (heureux soient les candides !), on connaît inévitablement la marque allemande MBL ne serait-ce que pour ses enceintes phénoménales ne ressemblant à rien de ce que nous avons l’avons l’habitude de regarder et d’entendre, avec ses transducteurs à lames dont les plus gros ressemblent à de lourds melons joliment fendus, utilisant un principe dit Radialstrahler. Les plus colossales d’entre-elles mesurent plus de deux mètres et sont couplées à des caissons de basse du même gabarit.

Vous occupez un gentil petit nid douillet dans la Capitale ?

Dommage.

Depuis des années, MBL est un stand sur lequel nous nous arrêtons avec attention au High End de Munich, où la présentation est toujours soignée, minutieuse et respectueuse, et, honnêtement, le grand spectacle qui est alors offert entre dans la liste restreinte des moments très attachants sur cette foire à l’empoigne : MBL, c’est trente ans de recherche et développement, mais aussi plusieurs années à présenter un des systèmes le plus ambitieux de la planète.

Comme chez beaucoup de constructeurs automobiles, des produits plus accessibles héritent du développement des démesurés « porte-drapeaux ». Ainsi, MBL propose deux autres gammes d’enceintes et d’électroniques utilisant les mêmes techniques. Si la promesse d’un spectacle en relief est la même, ces deux gammes sont plus adaptées à des pièces d’écoute de taille conventionnelle. 

MBL Lecteur CD/DAC - C31

Le lecteur CD/DAC C31 est un objet conséquent, à la fois convertisseur très complet et lecteur de CD.

Issu de la lignée Cadenza (ex Corona, on se demande pourquoi un re-baptême, n’est-ce pas ?), il partage le design de l’intégré C51 (testé en parallèle ICI) fait d’oppositions sur les lignes horizontales de courbes tendues, dans un bloc massif de 450 mm en largeur, 445 en profondeur et 145 en hauteur.

Décliné en blanc ou noir, associés selon options au chrome ou à l’or, les velléités statutaires et sélectives de MBL sont fièrement assumées, comme toutes les productions de la firme allemande. Pas d’une absolue sobriété.

Côté fonctionnalités, on passe sans difficulté du CD au Convertisseur intégré (la même chose sans la lecture). La télécommande cossue ou les boutons en façade permettent de faire défiler la liste des sources disponibles : CD, Coax, Optique, USB. 


Le chargement de la mécanique CD est de type mange-disque qui ne plaira pas à tout le monde. La fonction d’éjection, partage le même bouton que le stop. Et une fois le disque à l’arrêt, l’afficheur indique à la place du stop la fonction d’éjection ; logique. Il y a toutefois quelques astuces à ce propos que l’on trouvera en fin d’articles.

Le logo MBL sur la plaque supérieure du C31 est entouré d'un anneau lumineux sur lequel il est possible d'appuyer pour atténuer l'affichage du panneau avant en quatre étapes ou pour l'éteindre complètement.

Les appareils de la gamme Cadenza peuvent communiquer entre eux par le biais d'un système propriétaire "Smart Link" utilisant des câbles Ethernet pour garantir les accès aux sources différentes, des réglages communs de la luminosité de l'écran et permettre une utilisation d'une seule touche via la télécommande universelle fournie.

Au-dessus du connecteur IEC arrière, il y a un emplacement pour lecteur de carte SD intégré destiné à télécharger les futures mises à jour logicielles.

Si vous associez le C31 à l'un des amplificateurs intégrés ou préamplificateurs de la gamme Cadenza, il reconnaîtra les entrées numériques du C31, le "système" arrêtant même intelligemment l'oscillateur à cristal qui régit la lecture des CD lorsque, par exemple, l'entrée USB est sélectionnée - ou vice versa.

Mise à part la section CD logiquement en 16 bits / 44,1kHz, le convertisseur intégré ouvre à la lecture de fichiers jusqu’à 24 bits / 96 kHz engendrant un petit Ggrrr de la part de l’Auditeur(s) B : quand même, 24 / 96 ! Si ça suffit pour la plupart des mélomanes, on aurait pu attendre plus d’une machine aussi sophistiquée.

Pour comprendre ce qui caractérise ce machin baroque, on a pris un tournevis et euh… un stéthoscope, et on a décortiqué le truc. Amateurs de technologie, vous trouverez en bas de page une présentation en règle.

Et on a refermé l’appareil pour l’écouter.

L’appareil dispose de 3 entrées pour profiter du convertisseur :

1 optique Toslink isolée galvaniquement de 3 à 30 mW

1 S/PDIF sur RCA, de 0,2 à 5 V isolée galvaniquement

1 USB - B asynchrone, isolée galvaniquement.

Il propose également une sortie 1 S/PDIF sur RCA également isolée galvaniquement.

Dimensions (LxHxP) : 450 x 145 x 445 mm. Isolées galvaniquement.

Poids : 15,5 kg

MBL C31 1

Conditions du test : MBL C51, Accuphase E380, AVM CS3.2, Grandinote Supremo, Tsakiridis Aeolos Ultima, Mulidine Cadence « ++ », Harmonie et Harmonie « ++ », Wilson Benesch P1, Davis Courbet 8, câbles Absolue Créations, Van den Hul, Legato, Nodal, Mudra, Way.

Comme pour l’intégré MBL C51, nous avons partagé la tâche de l’écoute entre deux équipes, la première étant constituée de Moi.

 

Qualité du swing, de la vitalité, de la dynamique : 

Moi :

- le premier constat est immédiat : le lecteur CD-DAC C31 de MBL transmet un joyeux entrain ! Une irrépressible envie de suivre le rythme, de se laisser porter par la musique.

Oserai-je parler de bonhommie ? Presque. Après tout le Bavarois « d’Epinal » est bonhomme. Le Berlinois ? Moins, en effet.

Ce caractère en tout cas s’avère salvateur sur beaucoup de disques pas grandioses ; ainsi l’album Losing You de Will Taylor et son groupe Flyte, aux sonorités surannées, paré d’un synthé bonbon flashy et de guitares vintages : des mélodies pop-(corn ?) comme l’Angleterre en produit par wagons tous les ans ; où parfois un arrangement, des suites d’accords, une voix plus aguicheuse, surplombent la mêlée. Le C31 nous sauve d’un possible ennui et réussit à nous immerger dans une atmosphère qui fleure bon les papiers peints à fleurs. 

Sur le CD Make yourself du groupe Incubus, l’énergie transmise par le groupe devient aussi revigorante que des gifles d’oxygène en plein océan. Une franche satisfaction d’entendre que ça bastonne comme on aime. On est carrément surpris de se laisser cueillir encore par ce disque de 1999.


Passons à la Symphonie n°6 de Tchaïkovski mise en scène par l’Orchestre Symphonique de Chicago sous la direction de Claudio Abbado. Le MBL témoigne d’une promptitude à retranscrire le dessein de tout type de musiques. Une sollicitation de chaque instant qui, exprimée de la sorte, pourrait paraitre outrée, alors que la capacité du Teuton baraqué à communiquer l’intensité, la fournaise sous les notes, sert très bien des œuvres où la fureur dramatique est sous-jacente.

Même constat pour le thème The Unanswered Question de Charles Ives interprété par Leonard Bernstein à la tête du New York Philharmonic rendu particulièrement captivant, sachant que je m’y suis déjà ennuyé par le passé.

Dans tous les cas, les propositions artistiques se font Spectacle et les œuvres plus « show-off » que modérées, ne manquant ni de corps ni de pêche pour appuyer le récit.


Qualité du swing

DIAMs 4 Rouge 2 OR

 

 

Vitalité, dynamique

DIAMs 4 Rouge22 OR

 

 

 

Auditeurs B :

- mouais, alors bon, comment dire ? Certes, le C31 est un excellent pourvoyeur d’agréments immédiats, doté d’une autorité générale extra (bath ?) sans excès de couenne.

Mais nous sommes de notre côté (je rappelle que nous sommes trois « Auditeurs B » réunis pour ce test et que je ne parle pas de moi à la première personne du pluriel *) plus pondérés que notre cher ami A (en réalité L mais chut…), puisque, à l’écoute par exemple (on ne s’est pas compliqué(s) la vie côté choix de disque) de Fever de The Elvis Presley, la voix pourrait être plus hypnotisante, plus « bound » comme déclare notre Jean-Claude Van Da… notre angliciste de service. Quant au(x) swing(s), la contrebasse, très affirmée, n’est pas aussi tendue qu’on l’aimerait car si son « balancement », comme celui des percussions, est très correct, il est aussi un chouia trop carré ; mais surtout, celui onctueusement sensuel de la voix du King a perdu quelques atomes de ses phéromones si uniques qui renvoient Brad Pitt du côté des ours polaires. On note au passage que la lecture via le C31 gomme quelques sifflantes auxquelles nous sommes accoutumés.

Sur le très iconoclaste September Song (Kurt Weil) revu et corrigé à la sauce violons dégoulinants (ça n’empêche pas le talent) par Nat King Cole, le modelé dans les modulations outrées de la voix débobine des contours ternis. Pour autant le spectacle d’un autre temps est charmeur à souhait tant la raucité du timbre et l’ironie légère sont respectées à défaut d’un grain naturel.

Nous enchaînons avec un sens de l’à-propos dont nous ne sommes pas peu fiers sur la même pièce musicale, mais cette fois interprétée par les Suisses The Young Gods (frimeurs) lors d’un concert en hommage à Kurt Weil : on sait que la réédition récente dans une compilation soignée (XXY) grave une voix plus en profondeur (limite abyssale) que ce qu’on entend ici, ce qui engendre un lyrisme un poil court en nostalgie. Pour autant, si le C31 réinterprète à sa manière, le résultat, galbé, fonctionne vraiment, nous embarquant sur une autre mer.

Enfin Rêverie, 4e mouvement de la fantastique interprétation par André Cluytens de la fantastique Fantastique de Berlioz, avec le London Symphony Orchestra (si si !) une incandescente version et prise de son par la radio japonaise en live (1964, fichier DSD downsizé) : sans bouder l’allant pulsé par le germanisches DAC, nous est dérobé le petit surcroit nécessaire de flamboyance et diversité rythmique, de folie et de feu, de rebonds malicieux ou sorciers pour que tout soit parfait.

Toutefois, que ce soit clair : ce lecteur, à son prix, c’est la grande classe ! D’autant que le corolaire du constat ci-dessus est que la captation « pointue » n’est jamais fatigante.

 

Conclusion : sans que je sache forcément dire précisément pourquoi, je trouve ce lecteur très attachant.

DIAMs 4 Rouge 2 OR

 

 

 

Richesse des timbres - équilibre tonal :

Auditeur A :

- l’Opéra en quatre actes et prologue de Bernard Herrmann interprété par l’Orchestre National de Montpellier Languedoc-Roussillon sous la direction d’Alain Altinoglu, sorti chez Decca en 2011, est un étalon tout à fait respectable pour juger de la véracité des timbres et de l’équilibre général.

Déjà ressenti sur les passages musicaux précédents, l’aigu n’est pas singulièrement favorisé.
Cette partie du spectre semble mesurée, ou contenue, peut-être pour éviter toute surbrillance artificielle. 

Quelques bordures manqueraient-elles de saillant ? Je m’interroge.


D’une part l’équilibre général demeure très constant quels que soient les élans et d’autre part la présence des instruments, les voix de la soprano Laura Aikin, comme des barytons Nicolas Cavallier et Daniel Boaz, ne souffrent d’aucun défaut. Les acteurs sur la scène se distinguent par leur emplacement aisément identifiable et surtout par un rendu des timbres plein et entier. Pas plus qu’il n’a lieu d’exister en concert, un quelconque détourage artificiel n’apparaît sous l’œil du C31.

Il semble malgré tout que le piqué, la granularité des frottements, s’arrondissent légèrement, là où par habitude nous attendions plus de mordant.

Le médium est très vivant. Les modulations des vibratos des chanteurs et les intentions lyriques plus appuyées sont traduites avec conviction. 

Les pupitres de l’orchestre sont tout autant magnifiés, à la fois foisonnants et plantureux. Les instruments sont perçus en densité et volutes. Sans prédominer exagérément, ils semblent plus mis en relief que sur nos référents


Le grave n’accuse aucun excès. Il s’intègre au reste du spectre, ni envahissant, ni effacé, ni amaigri. Il complète justement l’espace tonal pour donner vie, garantir l’épaisseur des chairs, faire sursauter lorsque la musique l’ordonne. C’est en soi suffisamment remarquable pour être souligné : voilà une production haut de gamme qui ne surjoue pas dans cette zone du spectre, pour au contraire faire preuve de nuances en sachant appuyer si nécessaire mais avec retenue.

En conclusion, si le C31 semble avoir légèrement élimé les griffes du chat, il ne perd rien de son tempérament félin, à la fois agile et bondissant, soyeux ou rugissant en fonction des situations.

Timbres

Selon les goûts

DIAMs 5 Rouge 1 OR

 

 

Equilibre tonal

DIAMs 6 rouges

 

 

Auditeurs B :

- globalement d’accord même si de notre côté on regrette quand même que Nat King Cole déjà cité timbre un peu bas, ce qui ne retire rien à la sensation d’une grande élégance nonobstant une respiration harmonique limitée.

La réserve est un peu plus apparente sur le Berlioz, lui aussi précité, où on perçoit une mixture timbres/matières un peu identitaire. Très avenante mais réitérée.

DIAMs 5 Rouges

 

 

Scène sonore :

Auditeur A :

- Richard Dubugnon, Klavieriana Op. 70 & Chamber Symphonies Nos. 1 & 2. Le jeune auteur Suisse (et je ne dis pas ça parce que j’ai le même âge que lui) connait bien Paris pour y avoir étudié. Ce n’est qu’à la fin de son adolescence qu’il se dit que la musique pourrait bien être son truc, avant d’intégrer le Conservatoire de Paris pour apprendre l’art de la composition et de la contrebasse. Un cursus musical tardif, qu’il prolonge à la prestigieuse Royal Academy de Londres. Il reçoit, de l’Académie des Beaux-Arts de Paris, le prix Pierre Cardin, puis le prix de la fondation Vaudoise pour la culture (ah ben oui, alors tout est dit !) et, en 2015, le Grand Prix de la SACEM.

Salué et soutenu par des chefs d’orchestre(s) et interprètes de renom, tels Paavo Järvi, Kent Nagano, Gautier Capuçon ou Janine Jansen, il fait partie des compositeurs actuels les plus joués dans le monde. Je vous ferai l’économie d’une liste, elle est impressionnante.


Editées chez BIS, les Symphonies pour Orchestre de Chambre N°1 et N°2 sont entrecoupées d’un concerto pour piano nommé Klavieriana, clin d’œil au Kreisleriana de Schumann.


Qui du chef, du compositeur ou du lecteur MBL métamorphose un orchestre de chambre en grand orchestre symphonique ? Les trois, bien sûr. 

Le MBL nous place en léger retrait de la scène. Le concert se développe très en relief, large, étagé en profondeur, sans limite en hauteur (selon les enceintes). Les musiciens ne s’amalgament jamais et le spectacle nous saisit très vite.

Sur le concerto, on perçoit des arrières plans fantômes inspirés d’œuvres de Vivaldi, tel le paysage figé d’un tableau dans son cadre au milieu d’un traveling de cinéma. La musique est à la fois narration et élément du récit

Le C31 place en ordre (avec un excès de minutie ?) ces différents thèmes entrecroisés en laissant à l’illustration la place secondaire qui lui permet de ne pas brouiller la compréhension générale.

Auditeurs B :

- à l’écoute de la même œuvre (que je ne connaissais pas ; nous avons donc eu la curiosité de jeter une oreille avec beaucoup d’amusement sans être émerveillés. Pas vraiment original et Stravinsky est passé par là) nous avons eu l’impression d’atmosphères légèrement écourtées, ce que nous nous empresserons de vérifier sur un autre DAC.

Découvrir un disque sur un appareil en test est toujours intéressant : si l’œuvre trouve d’emblée sa place dans la longue playlist de nos amours, c’est bon signe.

L’impression d’une ambiance de salle simplifiée est vérifiée sur le Berlioz, accompagnée d’un léger pompage de la dynamique, pas tout à fait libre alors que le ciselé des instruments bouillonnants est d’un haut niveau. Le placement des musiciens s’identifie plus par pupitres que par individus, mais il faut connaître le disque pour s’en rendre compte, puisque, tel quel, c’est très convainquant !

DIAMS 4Rouges

 

 

 

Réalisme des détails : 

Auditeur A :

- d’une grande probité malgré le refus de découper les instruments au scalpel, les différentes plages musicales reproduites par le C31 se dégustent tous styles confondus avec délectation.

Sur l’opus Gost Songs #3, paru chez Neuklang en 2021, le parisien Paul Jarret emprunte au jazz nordique un style de composition pour le moins connoté. Secondé au saxophone par Julien Pontvianne, Jozef Dumoulin au synthé pour enrichir les thèmes de couleurs et fines matières, les compères étalent avec le batteur Jim Black une sorte de pop-jazz-électro vagabonde sans parole. 

Le fût de la grosse caisse du batteur s’entend dans sa profondeur ; le souffle que produisent les impacts devient même perceptible. 

Sens des textures, richesse des retranscriptions, les élucubrations graphiques du quartet révèlent tout leur intérêt entre les « papattes » du C31 qui s’évertue à concrétiser les instruments. 

La petite formation autour de Paul Jarret trouve ici une ampleur remarquable.

À ce stade, on commence à sentir les similitudes et divergences de signature sonore entre le C31 et le C51, l’intégré MBL testé parallèlement : tous deux réfutent une forme de brillance artificielle. Pas d’éclat factice ni d’instruments en caoutchouc. Un équilibre s’installe entre textures explorées et légèreté contenue des enchainements de notes, à la faveur d’une forme de densité servant la présence des musiciens. Cependant, le C31 est plus vif, plus réactif, plus bondissant que son complément naturel, l’intégré C51.

Auditeurs B :

- on rejoint l’analyse du solitaire Auditeur A ; et, pour nous en convaincre, nous avons procédé à un petit comparatif : trois « fichiers » du 2e Concerto pour Piano de Bartok, 3e mouvement, Géza Anda au clavier, Ferenc Fricsay à la baguette.

- lecture CD de la première édition Deutsche Grammophon

- le fichier rippé du même disque via dBPoweramp, sans compression

- un fichier DSD, donc évidemment rééchantillonné en PCM pour passer par le DAC du MBL

Via la lecture CD, cette fascinante version, toute en nerf et électricité, y compris dans le son, ne franchit pas toujours une analyse de façade

Le fichier rippé prend un peu plus de relief ; tout en sentant bien qu’on pourrait en espérer plus, le déchiffrage nerveux distille un grand sens du texte, sans fatigue, restant tout de même à la surface de l’intensité artistique proche du brûlot.

Les échanges complexes entre piano et orchestre fonctionnent impeccablement faisant oublier l’absence de micro-dynamiques subtiles, aussi bien en lecture CD que fichier 16/44. Avec un léger plus cependant en faveur de la lecture fichier.

La même œuvre en DSD, même réduite en PCM, insuffle plus d’air avec pour conséquence amusante que l’enregistrement fait plus son âge, le piano notamment, ce qui est une preuve de description plus fine, plus approfondie, musicalement parlant ; les frappes de piano sont très différentes d’un fichier à l’autre, et pour ce dernier « container », plus proches du vinyle dans la « saleté » un peu raide mais ô combien plus excitée, expressive, incluant une bien plus incisive différentiation des timbres et des lignes de modulation de l’orchestre où soudain par exemple, une petite flûte, sans quitter sa place, révèle sa couleur et sa frivolité.

Nous faisons ce genre de test à chaque fois qu’on nous soumet un lecteur CD, et ceux qui sont à même de décrypter une si sensible différence de teintes et de nuances ne sont pas nombreux.

Exercice reconduit, comme ça pour voir, entre le CD de Tears for Fears, Songs from the Big Chair et le fichier 24/96 où sans ambiguïté les impacts, impulsions, timbres et pétulance des éclats divers impriment une différence flagrante ! Une vitre bien plus propre qui prouve la propension du C31 à exposer les écarts qualitatifs des contenants sonores.

Pour autant, le C31 peut-il espérer une place de champion sur le podium de la transparence effective ? Pas tout à fait. Reconnaissons qu’il est en revanche un héraut de la synecdoque !

En clair : le MBL C31 se tient très bien ! …

DIAMs 4 Rouge 2 OR

 

 

Expressivité : 

… Et puisque nous avons la parole, nous, Vénérables Auditeurs B, gardons la parole !

- … non mais attends…

- c’est comme ça, c’est pas négociable !

Ainsi, avons-nous précédemment émis quelques réserves sur la volupté du swing d’Elvis Presley, ce qui, de fait, nous laisse passablement sur notre faim côté implication de l’expression, le C31 ne trahissant certes pas les œuvres (pas si mal) mais ne nous conduisant au plus près de l’intimité charnelle avec un artiste pourtant aussi érotique que The King

… ou impliquante telle notre chouchoute Billie Eilish, dont le texte apparemment simple mais si inspiré par un féminisme concret dans Not my Responsability ne nous atteint pas aussi directement dans l’ambivalence que son « hymne » à la différence, au respect de chacun, à la discrétion, au refus du regard ou, pire, du jugement des autres, peut atteindre quand vient s’ajouter la vibration du cœur, les palpitations des veines, les imprégnations tendres de la respiration de la chanteuse dont la maturité artistique ne cesse de surprendre.

Oh attention, rien à dire sur la présence compensant le défaut d’incarnation, et on profite avec le C31 de capacités qui sont loin de fourbir l’arsenal démonstratif de nombreux lecteurs pourtant nettement plus coûteux.

Le lecteur/DAC MBL C31 est donc une sympathique découverte, plus universelle, considérons-nous, que l’intégré de la famille.

DIAMs 4 Rouge 2 OR

 

 

Ça vous aide, non ?

 

Auditeur A :

- … Merci pour le cadeau… Bon… Comme évoqué plus haut, l’engin ne manque ni de tonus, ni de force de caractère. Indéniablement le spectacle sonore se vit intensément.

Si bien qu’on se sent souvent interpellé par les protagonistes, comme sur le Silence de l’Acte IV, de l’Opéra en quatre actes et prologue de Bernard Herrmann.

Mais cette prenante détermination communicative, cette capacité à maintenir une tension même lorsque les passages musicaux semblent éteints, ne sont-elles pas parfois un peu erronées ? Ou à minima accentuées, scénographiant un suspens maintenu à l’extrême par simple plaisir de faire frissonner ? Ce n’est pas impossible. Pour autant, et même si le C31 en fait un peu trop, nous apprécions son côté joueur.

Jungle Blues de CW Stoneking (2008) nous transporte sur les rives d’un Mississipi fantasmagorique. Curieuse plongée en eaux troubles que nous propose l’australien Christopher William, envoûté par les sons d’un autre temps, imparfaits et colorés.

Le C31 sait animer le trouble charme vaudou d’un disque peu ordinaire. Le swing des cuivres et l’épaisseur des percussions contribuent à nous installer en bordure de forêt poisseuse, pieds dans le bayou. Ne manquent que les parfums des épices et les vapeurs d’alcool se mélangeant aux effluves de sueurs moites.

Mais voilà, précisément : ils manquent…

DIAMs 5 Rouges

 

 

 

Plaisir subjectif :

Dernière vérification, ou prétexte pour jeter une oreille au récent album de Pokey LaFarge. Une fois de plus nous voilà aux sources d’un Rock & Roll blanc qu’on imagine volontiers au volant d’une décapotable Chevrolet Impala turquoise. Le jeune américain qui n’a bien sûr connu cette période qu’à travers les films et la musique de ses grands-parents nous y replonge pourtant, fantasmée en partie par l’intervention salvatrice du MBL.

Peut-être l’appareil concocte-t-il des ambiances de salle et un entrain typé des musiciens plus savoureux que nature. Et alors : on prend goût très rapidement à son tempérament enjoué, un rien aguicheur. 

Thomas de Pourquery, en apesanteur sur son Back to the Moon, suggère un voyage sidéral, un rien navrant mais joliment produit. Là encore le MBL nous sauve de l’ennui en nous livrant la succession de thèmes naïfs et positifs moins pusillanimes qu’on les connait. Aubaine ou trahison, chacun jugera, mais somme toute, il faut parfois oser se mêler de l’art des autres, non ? **


Un appareil qui donne envie d’écouter et sauve souvent les musiques en ne lassant jamais, ça ne se boude pas. Voire, ça n’a pas de prix.

Pour le petit excès de sucre :

DIAMs 6 rouges

 

 

 

Rapport Qualité/Prix :

Au prix du C31 MBL, la compétition est pléthorique. Dont quelques concurrents sérieux.

Pas tant que cela cependant si on ajoute en un même châssis un lecteur CD bien fait. En outre, tous ne partagent pas sa franche autorité, son tempérament.

Un très léger manque de finesse ou de légèreté expressive retranche possiblement un diamant à la note finale. Monde imparfait et cruel.

De même nous est-il impossible de nous réconcilier sur la manière d’apprécier les intentions joueuses de l’appareil. Certains d’entre nous ont souhaité le récompenser pour les réjouissances indéniables qu’il déploie, même s’il n’est pas impossible qu’il fanfaronne un peu.

Mais nous sommes d’accord sur la revendication du « petit » lecteur MBL d’une incitation au plaisir déculpabilisé.

DIAMS 4Rouges à DIAMs 5 Rouges

 

Auditeurs B :

- mhhh. Je trouve l’Auditeur A bien timoré. Je n’ai pas été bouleversé par l’intégré C51, mais je n’ai guère de doute sur le rapport qualité/prix du C31, nonobstant quelques réserves qui ne retirent rien à son positionnement dans un marché certes débordant de propositions mais dont l’immense majorité visent notre poubelle de guides engagés.

DIAMs 6 ROUGEs

 

 

 

* A la troisième personne du singulier, oui, parfois

** Auditeurs B : non !


 

Le chapitre technique :

Le C31 a été conçu comme un convertisseur muni d’une mécanique de lecture CD de haute qualité.

Le design cache une singularité : un boîtier dans un boîtier, composé d'un châssis en acier et d'un revêtement en aluminium (finition noire ou blanche en option), sans aucune vis apparente qui pourrait nuire à la pureté des lignes. Les alimentations, les étages numériques et analogiques du C31 sont protégés par des cloisons à blindage magnétique.

Le transformateur toroïdal de l'alimentation linéaire régulée utilise des enroulements isolés pour l'affichage, le contrôle, le transport du CD et les sections analogiques et numériques de l'unité.

Le drive à fente est conçu spécialement pour l’audio (et non un lecteur de DVD-ROM ou de CD-ROM d'ordinateur). Le mécanisme d'entraînement est fabriqué par Sanyo, la diode par Sony, tandis que décodeur CD et servo viennent de Philips. Le lecteur est pourvu d’un réglage automatique du gain pour les CD, CD-RW et CDR.

Le Convertisseur Numérique / Analogique couvre une gamme dynamique très élevée liée à un bruit extrêmement bas et un THD (distorsion harmonique totale) très faible, ce qui se traduit par des basses profondes et structurées d'un côté et des aigus fluides à haute résolution de l'autre.

Dixit le fabricant.

 

Le filtre numérique de la section conversion (numérique vers analogique) est dit : filtre psychoacoustique divisé entre 4/5 de phase minimale et 1/5 de phase linéaire en vue d’une reproduction beaucoup plus naturelle. La scène sonore, le timbre et la fluidité des instruments bénéficient tout particulièrement de cette optimisation.

Dixit le fabricant

Qui dit aussi que l'audition humaine est 4 à 5 fois plus sensible au « pré-ringing » qu'au « post-ringing », de sorte que le filtre numérique est découpé en fonction de la caractéristique de l'audition. Pour cela, Juergen Reis, chef ingénieur MBL retravaille chaque puce standard pour éliminer le pré-ringing

 

NB de l’Auditeur(s) B : c’est un effort louable car divers documents techniques disent que le pre-ringing n’est pas audible. Comme quoi, les débats potentiels sont sans fin.

Le fabricant souligne que, si on se contente de lister les composants, la puce de conversion utilisée dans le C31 se trouve dans plusieurs appareils concurrents ; or, chaque machine aura un son différent et même donnera des résultats différents à la mesure. C'est donc la technologie développée et réalisée avec ces composants qui a le plus d'impact sur le son.

 

L'étage de sortie analogique est doté d'un filtre à retard de groupe optimisé qui, conjugué avec la conception à faible bruit et faible distorsion, donne plus de contrôle sur la musique et un son plus ouvert et bien défini. Ce point s'applique également au préamplificateur MBL C11 et à la section préampli de l'amplificateur intégré MBL C51.

MBL a apporté un grand soin à l'équilibre tonal, afin d'obtenir un son naturel et caractéristique.

Il est obtenu par la combinaison d'un convertisseur delta sigma pour les bits inférieurs, afin d’obtenir un son droit et une bonne scène sonore, et d'un convertisseur de type échelle pour les bits supérieurs, afin d'avoir un bon contrôle des basses avec une résolution précise. Pour les bits supérieurs est ajouté un principe dit de « scramble » qui fait alterner les différents chemins de type échelle de manière irrégulière, afin d'éviter toute distorsion possible de type "échelle". Cette conception associée à une horloge "master" propre et précise sont les principaux ingrédients pour obtenir le meilleur son possible.

C’est limpide.

Un autre point important est que le C31 épure chaque voie du signal audio numérique avec une PLL FIFO (boucle à verrouillage de phase : premier entré - premier sorti) numérique à analogique intégrée.

La sortie du signal USB présente de toute façon une très faible gigue (jitter) (grâce à un mode Master Clock similaire à l'USB asynchrone), mais le timing du signal numérique provenant du lecteur de CD, ou du S/P-DIF (Coax et Toslink) est épuré avec précision et livrera un Digital Out (sortie digitale) au niveau 1:1 Bit True.

Quelques détails à ce sujet : les données audionumériques entrantes passent par une PLL numérique avec un filtre passe-bas situé très haut (environ 10 kHz) afin de se verrouiller très rapidement sur le signal. Ensuite, la sortie de la PLL numérique va dans une mémoire tampon FIFO (First In - First Out) et cette mémoire tampon est lue par la sortie d'une PLL analogique avec un filtre passe-bas de 1 Hz, afin de supprimer toute gigue possible dans le flux de données.

MBL a également développé un concept astucieux qui ne laisse fonctionner qu'un seul oscillateur à quartz à la fois. Par exemple, si le lecteur de CD fonctionne, les deux oscillateurs de l'entrée USB (famille 44kHz et 48kHz) sont désactivés. Ou encore, si vous utilisez l'entrée S/P-DIF (Coax ou Toslink), toutes les parties du lecteur de CD seront mises en veille (après 10 secondes).

Si vous n'avez pas de CD dans le lecteur pendant ce processus, vous pouvez lire "CD off" sur l'écran et si vous avez un CD dans le lecteur, le lecteur se met encore en veille, mais l'interface de contrôle laisse un signe d'éjection, au cas où vous voudriez avoir accès au disque. Lorsque vous appuyez sur le bouton d'éjection, le lecteur se réveille et libère le disque, puis se remet en veille. Lorsque le lecteur est en veille et que vous lisez le message "CD off" sur l'écran, il n'est pas possible d'insérer un nouveau disque, mais lorsque vous sélectionnez à nouveau l'entrée CD, parce que vous souhaitez lire un CD, le lecteur se réveille et vous pouvez insérer un disque.

 

Le C31 embarque un transformateur d'alimentation torique avec deux blindages électrostatiques et un blindage magnétique (Mu-métal), pour une isolation maximale du secteur. Il est constitué de plusieurs enroulements isolés pour l'audio analogique, l'audio numérique, l'interface utilisateur, l'affichage et le mécanisme du CD.

Les tensions différentes sont ensuite contrôlées par des régulateurs dédiés à faible bruit et à large bande passante pour tous les oscillateurs.

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