Cellulle MC - Hana SL

Ain’t no cure for love

Par LeBeauSon - novembre 2017

Le jour où vous songerez à changer la cellule de votre platine vinyle, vous suivrez peut-être d’autres conseils, mais prenez le temps de lire ce compte-rendu d’écoute de la cellule MC Hana SL. 

Arrive donc ce moment où vous constatez la cruelle nécessité de changer votre cellule, soit parce que la vôtre est usée, ou parce que vous ne supportez plus son indigence musicale.

Et là se pose la question : MM ou MC ? Hum… Pour les néophytes : Aimant Mobile ou Bobine Mobile.

Ça ne vous aide pas ? Faudra qu’on songe à faire un article.

Tout ce qui se dit à ce sujet est presque vrai. Disons que c’est statistiquement vrai. Les cellules MC offrent généralement une retranscription plus délicate, ciselée, plus juste et plus harmonieuse aussi, plus proche du vivant. Elles ne peuvent que très rarement s’affranchir d’un étage supplémentaire sur le préampli phono, dit « pré-pré » ou d’un transformateur d’impédance, surtout les versions dîtes «bas niveau» comme celle que nous allons décrire. 

Pas d’inquiétude : de nombreux étages phono incluent la possibilité d’une cellule MC, mais vérifiez quand même. Les plus élaborés permettent d’ajuster l’impédance d’entrée accordée aux caractéristiques de votre cellule.

Les MC sont aussi globalement plus chères que leurs cousines MM, atteignant quelquefois même des budgets stratosphériques. 

Alors, si nous vous disions que, pour un investissement à peine plus important que celui d’une MM de moyenne gamme, vous pourriez franchir ce cap et acquérir une MC simplement merveilleuse, qu’en penseriez-vous ?

«  Un miracle cela ne peut exister ». « Ou alors il y a bien longtemps … » « Et encore, on n’en est pas tous certains ». « Il y a forcément un loup quelque part »…

Que dire dès lors de cet artisan japonais qui ne produit que 2 x 2 modèles (déclinaison de deux corps pour haut niveau ou bas niveau de sortie (celle du test) avec variante de taille de diamant, elliptique et « Shibata »), défiant la hiérarchie du marché, laquelle affirme (à tort, les exemples sont nombreux) que les plus coûteux sont aussi les meilleurs.

Quoi qu’il en soit, voilà bien deux (quatre) cellules abordables faiseuses de merveilles, dont le modèle le plus onéreux ne dépasse pas 700 €.

Celle du test, l’Hana SL, S pour « Shibata », L pour low gain, bas niveau de sortie.

Quoi, 700 € ?! … pour un si petit morceau de confection !!!
Mais songez à des concurrentes pouvant dépasser 5 000 €, que l’Hana SL ose titiller.

Dernière info technique non négligeable : la masse de la cellule et sa compliance (oui on sait, on vous racontera, chaque chose en son temps) en font une cellule facile à marier avec des bras légers et moyens. Autrement dit, elle est plutôt universelle.

Donc si vous appréciez le vinyle, un budget abordable entre 450 et 700 € (ce que coûtent les Hana) mérite réflexion, et ces quelques lignes votre attention.

Musique, Hana !

Vous vouliez mettre simplement un disque, faire autre chose en même temps peut-être : lire, oui voilà lire en musique. Oubliez l’idée ! 

Jusque-là, vous pouviez vous échapper, faire autre chose en même temps. De la mélodie, vous ne captiez qu’une part guère impliquante, facile ; laissé à distance, vous ne vous sentiez pas concerné par les enjeux romantiques ou symphoniques ou rythmiques. 

Car enfin vous accédez à une dimension cachée, à ce palier dans le jeu musical où votre corps bat en rythme, où votre peau s’émeut. L’expérience est enfin remarquable de délicatesse, de subtilités, d’expressivité. Croyez-moi, vous aimerez vivre l’écoute en « Technicolor ».

Allons allons un peu de concentration pour rentrer dans les détails. Le lyrisme, c’est bien mais c’est le boulot des musiciens et de votre chaîne.

Alors que dire de cette Hana SL ?

Nous parlions de déclinaison. Celle-ci est facile à comprendre.

Le premier modèle adopte un diamant (Stylus) d’une taille ELLIPTIQUE. Il se décline en Haut ou Bas niveau, avec les références EH ou EL, soit (Eliptique + Hight) ou (Eliptique + Low).

Nous avons eu le plaisir d’écouter la version EH, déjà magnifique, sur une petite Pro-Ject Debut Carbon bien réglée (attention, le contrepoids d’origine peut être un peu maigre). Vous l’avez compris la cellule équivaut dans cet exemple précis au prix de la platine tout entière, mais quelle efficacité, quel régal.

Nous traduisons dans le présent article notre ressenti des hautes vertus de la version SL. Soit, vous l’aurez compris, une taille de diamant Shibata, en bas niveau de sortie.

Osons le clamer, cette cellule fait de toute écoute un instant suspendu, captivant. Posez le diamant sur le disque, dès les premières notes l’Hana SL vous attrape l’oreille, envoûtante. Ainsi nous fut-il très difficile de quitter nos écoutes pour nous concentrer sur l’écrit.

Elle révèle de cet album que vous aimez l’œuvre d’art à peine effleurée jusque-là.

Chaque instrument retrouve sa couleur originelle, se campe à sa place et retentit de tout son volume, jusqu’à l’expiration du dernier son, dans une chorégraphie que vous voudrez rejouer égoïstement ou partager passionnément. Une guitare exprime la tension des cordes de l’instant du pincement jusqu’à l’extinction de la vibration amplifiée par la caisse. Un archet fait entendre le frottement sur les cordes au point d’en distinguer le geste tiré ou poussé. Tous ces détails vous mettront en émoi, parce qu’ils livrent tout de l’œuvre, intégralement perceptible, vous forçant à l’empathie avec les musiciens si magnifiquement incarnés. Tout ceci bien sûr à condition d’un réglage de la cellule aux petits oignons et d’un niveau d’équipement cohérent.

Les musiciens sont devant vous à nu. Ils vous imposent leurs jeux et vous livrent leurs émotions à domicile. En susurrant à votre oreille ou en vous hurlant dessus, chaque posture se révèle plus palpable, plus émotive.

Voilà, c’est cela. Une Hana vous captive, vous attrape et ne vous lâche pas. Fini, terminé ! 
Vous voilà soumis, jouet de cette déesse de la retranscription, oui sans regret aucun. Vous allez adorer !

Diamant Shibata (ou hyper elliptique) :
Inventé par Norio Shibata, le concepteur donne son nom à une taille de diamant particulièrement adaptée à l’empreinte du sillon, lui permettant d’épouser plus étroitement sa forme pour récolter un maximum de micro-informations et notamment les fréquences supérieures à 30 kHz.

J’écris « micro » informations en me reprochant ce terme. Car, précisément, ces détails nourrissent une retranscription pleine, naturelle, incroyablement palpable et visuelle. 

Regardons à présent suivant nos critères privilégiés ce que nous inspire cette cellule.

RICHESSE DES TIMBRES & ÉQUILIBRE TONAL :
Sur ce critère, comme sur les tous les autres, cette Hana nous a bluffés. Elle offre une écoute particulièrement pleine. Il semble qu’à la fois rien ne manque au spectre sonore, mais aussi que chaque instrument retrouve son piquant, ou sa rondeur, ses couleurs naturelles. Avec elle, nous sortons de toute considération « hifiste » pour profiter des musiciens et de l’œuvre. 

Naturel, encore une fois : les aigus sont fins, délicats, capables de faire scintiller les cymbales caressées par une paire de balais. Pourtant, à aucun moment, ils ne prennent les dessus ou ne crispent l’écoute. 

Le médium d’une richesse exemplaire étonne. Nous sommes pourtant devant une cellule MC presque d’entrée de gamme. Mais son expressivité, sa capacité à placer une voix, permettent de tout ressentir et ce dans un silence remarquable car les bruits de surface sont repoussés très loin en arrière.

Globalement très équilibrée, le registre grave de l’Hana SL n’est pas en reste. Il est ferme, rapide, et présent sans jamais déborder ou grossir le trait. Une contrebasse claque et fait entendre son corps de caisse comme l’exacte tension des cordes. Sur le titre The One That Got Away de l’album « Small Change » de Tom Waits, on goûte toutes les subtilités du touché du contrebassiste, tantôt vif, tantôt coulé, dans un groove irrépressible. Autre des qualités de cette cellule, nous allons y venir.

RÉALISME DES DÉTAILS
Vous butez en anglais ? Révisez vos classiques avec cette cellule et vous perdrez peut-être votre accent frenchy. 

Sans avoir jamais ce sentiment désagréable qu’il resterait des informations oubliées, Hana SL ne suscite aucune réserve. Vous percevrez, sans doute comme nous, mieux qu’auparavant avec plus de joie et de plaisir aussi, le claquement de doigts discret du chanteur pour rester dans le rythme de ses camarades de jeu. Pour peu que l’enregistrement le permette, vous entendrez les lèvres se crisper à l’embouchure d’une trompette. 

La transparence de la retranscription permet de tout déchiffrer avec délice, de tout entendre, une gourmandise non sans dommages collatéraux : très rapidement l’envie d’acheter encore des vinyles, ou de tout réécouter se fait très … pressante. 

SCÈNE SONORE
Une fois encore, commençons par exprimer le caractère NATUREL du spectacle. Certains appareils veulent exagérer, surligner, flatter … Rien ici. L’Hana SL n’en a pas besoin. Elle délivre tellement de qualités qu’elle semble offrir le spectacle du direct « stricto sensu », tel que gravé sur le disque. 

En tout cas, puisque nous n’étions pas présents aux enregistrements, c’est l’impression qu’elle laisse. 

La réverbération de la pièce, l’espace entre les musiciens, leur verticalité, la présence d’un pupitre jouant délicatement devant, puis un autre lisible au fond à droite aux apparitions pourtant clairsemées. 

Nous nous sommes surpris à apprécier pleinement des œuvres trop connues comme ce pressage allemand original de la Pastorale interprétée par le Philharmonique de Berlin dirigé par Karajan enregistrée en 1962. 

Quelle joie de pouvoir savourer à nouveau ce type d’enregistrements qui retrouvent une forme de fraîcheur, de beauté inexplorée.

QUALITÉ DU SWING
Comme pour les autres registres, l’Hana ne trompe pas. Elle livre la musique telle quelle. Cette absence de parti-pris ou plutôt cette immense discipline permet aux musiciens de nous amener à nous laisser aller à un pas de danse. Il est impossible de ne pas battre la mesure, simuler un batteur, mimer un pianiste. 

L’auditeur, accaparé par le rythme, reçoit l’essence même du message : la musicalité. 

PERCEPTION D’ENSEMBLE

L’Hana s’affirme comme une évidence. 

Signe d’une renommée internationale méritée, elle ne cesse de récolter des récompenses. 

Sans cesse, les qualités incroyables mises en avant sont identiques : une retranscription naturelle, un grand pouvoir de résolution, des timbres riches et caractérisés, une scène sonore réaliste, envoûtante …
Ce type de produit réconcilie avec la profession de foi de la « haute-fidélité », voire même engendre des passions. Vous invitant à la dégustation, elle suscite l’envie de plus de musique, donc d’acheter plus de disques. 

On pourra lui associer des platines relativement modestes, comme de beaucoup plus expertes, voire prétentieuses. Presque universelle, son poids et sa compliance lui permettent d’être associée à un très grand nombre de bras. Cette Hana SL à aucun moment ne démérite, un choix sûr, pour un investissement contenu : un genre de miracle. 

Comme à chaque fois, nous vous recommandons de questionner votre point de vente, pour choisir bas ou haut niveau, ou plus simplement le modèle qui vous correspond. 

Bref, une bonne cellule vous offrira de quoi vous voir mieux qu’au concert, téléporté dans l’intimité de la prise de son, face aux musiciens, plus sensibles, plus engagés et plus fabuleux que jamais. Il est donc normal que ce tout petit concentré de technologie coûte parfois le prix de votre platine, voire un peu plus. Ce bijou offre la flamboyance à votre système, révèle toute sa superbe !

Car n’oubliez pas que la cellule est le premier élément au contact du support : sans lui, pas de magie. 
Et cette Hana est de cette trempe-là.

Dernière recommandation

Une platine vinyle est un instrument d’une extrême sensibilité. La plus infime vibration pollue le signal. Le moindre réglage défaillant fait perdre quantité d’informations. La précision nécessaire pour affiner les réglages de votre platine vinyle est comparable à la rigueur d’un mécanisme de montre.

La cellule fait partie de ces éléments cruciaux qui enrichissent notablement l’écoute. Les meilleures d’entre elles vous permettent de tutoyer les étoiles, ou plutôt de les entendre vous postillonner  dessus, reprendre leur souffle, atteindre ce moment craintif où la note s’étire jusqu’au bout du phrasé. Ce tout dernier filet d’air qui révèle la fragilité d’une cantatrice … mais à la condition sine qua non d’être parfaitement réglées, votre bras ajusté lui aussi.

Puisqu’il est indispensable que votre platine soit réglée au cordeau, n’hésitez pas à demander à votre magasin de vous guider, ou mieux … de vous l’installer.

Parmi les paramètres à contrôler, le bras doit poser à l’horizontale sur le disque, pour permettre la parfaite inclinaison du cantilever (tige porte-diamant) : on appelle ce réglage VTA (Vertical Tracking Angle). Le contre poids, la force d’appuie sur la cellule se peaufine à l’oreille autour de la valeur proposée par le constructeur après quelques heures de rodage. Faites-vous confiance.  

Bien entendu, la platine elle-même se doit d’être parfaitement horizontale. Il faudra aussi vérifier l’azimut de votre bras, parfaire le réglage de l’antiskating, tout comme l’alignement de la cellule dans l’axe du sillon, tout ceci au dixième de millimètre prêt. Oui, tout s’entend.

Voilà aussi pourquoi, avant d’acheter une platine vinyle, s’impose de bien observer les différentes possibilités de réglages et d’évolutions que propose l’objet. Dès que vous aurez envie de plus de plaisir, il vous faudra sans doute changer de câbles, ou de cellule, peut-être aussi le plateau, le bras … et tous ceux-ci doivent pouvoir s’ajuster, se régler.

Pensez-y : un objet trop simpliste, ne permettant pas tous les réglages du bras, ou le remplacement des câbles, risque de vous frustrer.  

Mais ne vous inquiétez pas pour autant : bon nombre de platines modernes fonctionnent magnifiquement d’emblée et sont intelligemment évolutives, prêtes à recevoir : une Hana SL !