Mastersound Box
Six bulles de verre
Par LeBeauSon - Octobre 2021
Perception d’ensemble
Il se passe réellement quelque chose d’assez rare à l’écoute de Box, qui permet de réjouir les partisans du tube sans faire fuir les détracteurs, et c’est une performance plutôt rare.
En effet, s’il évite les épanchements flatteurs, mous et sirupeux que certains apprécient dans le tube, et alors qu’il procure à la musique une sorte d’urgence, il sait préserver une poésie à part, faites d’enluminures et de finesse.
Précis, plutôt vif, capable d’élans dynamiques impressionnants, ce petit intégré fait honneur au renom la marque italienne…
A ne pas négliger donc.
Prix : 2 950 €
MastersounD n’est pas une marque inconnue pour les lecteurs de nos colonnes, puisque nous avons déjà étudié un modèle précédemment :
https://www.lebeauson.fr/a-l-oreille/223-MastersounD-evo-300b-la-belle-histoire-2
Article dans lequel je me suis fendu d’un long historique…
Voyez où je veux en venir ?
MastersounD, fabricant italien agissant depuis plus de 15 ans réalise une gamme très diversifiée d’amplificateurs exclusivement à tubes (ou lampes, c’est au choix), utilisant des types de lampes (ou tubes, c’est au choix) de tous genres, triodes ou pentodes, avec la fierté de fabriquer ses propres transformateurs de sortie, élément fondamental d’un ampli à lampes (ou… euh).
« Gamme très diversifiée » se traduit par une liste de prix de 2 950 € (le candidat du jour) à 48 000 € pour les éléments séparés les plus prestigieux.
MastersounD propose avec le Box un amplificateur intégré abordable sous l’esthétique plus convenue d’un châssis métallique compact, ajouré par une large fenêtre transparente en façade (pour voir les lampes. Les tubes). L’appareil n’en bénéficie pas moins du savoir-faire du constructeur qui s’est concentré cette fois sur l’utilisation d’une pentode souvent appréciées des audiophiles pour le mélange de charme et puissance honorable qu’elle délivre, l’EL34. Plus rare, le montage n’est pas en Push-Pull de 2 x EL34 par canal mais un simple étage parallèle de 3 tubes (…), en classe A, délivrant la confortable puissance de 35 W, identique donc à ce qu’on aurait obtenu avec un Push-Pull, mais théoriquement sans les inconvénients du déphasage. Au risque de moins de tenue dans le bas…
Théories…
La marque est restée fidèle à la confection des transformateurs de sortie dédiés permettant la suppression de toute contre-réaction négative exerçant une influence directe à l’écoute sur une vaste scène sonore.
Les étages d’entrées et drivers utilisent des tubes ECC802 pour 3 entrées haut niveau et une entrée phono MM.
Courte description fonctionnelle ?
- Puissance maximale : 2 x 35 W donc
- Impédance de sortie : 8 ohms ou 4 ohms
- 4 entrées RCA dont une phono MM
- 1 sortie RCA à niveau fixe pour enregistrement
- Réponse en fréquence : 18 Hz à 25 kHz à 0 dB
Les dimensions ? 436 x 185 x 409 mm pour un poids (masse, corrigerait Tonton Sérieux) de 24 kg, encore un bon truc pour le dos ou les étagères.
Conditions d’essai :
Chord 2Go2Yu, Atoll DAC300, Eera Andante, Michell Tecnodec + cellule Ortofon 2M Blue, enceintes Atlantis Lab AT18, Mulidine Cadence « ++ », PMC 25/24i, Davis Courbet 8, câbles Van den Hul, Legato, Absolue Créations, Nodal, Mudra.
Je précise, si c’est encore nécessaire, que les conclusions d’écoute sont toujours à rapporter au prix !
Richesse des timbres et équilibre tonal :
Une nouvelle version de la Trilogie Romaine de Respighi… Ça devient obsessionnel chez mon collègue Tonton Sérieux (je m’en veux soudain de l’avoir surnommé ainsi un jour d’exaspération) en visite chez moi, qui a suggéré qu’on écoute ça pour commencer. Parce que l’intégré en test est italien ? C’est fin !
Pas exactement ma came, mais pourquoi pas. Le trublion a précisé que les enregistrements de la trilogie au complet ne sont pas si fréquents, notamment Les Fêtes souvent mises de côté.
Là, c’est par le touche-à-tout John Wilson et son orchestre ressuscité (le Sinfonia of London chez Chandos en 2020), qui lancent une version énervée des Fêtes Romaines qui démarre à fond de train, une cadence qui n’a guère de sens illustratif et tourne de temps en temps à l’excitation hystérique. Mais je la recommande quand même, c’est un tourbillon d’ivresse enthousiaste, plus contrasté que nuancé, qui ne nuit pas au bonheur d’entendre s’épanouir l’éclosion des couleurs, divaguer sous la pluie de timbres qu’appelle l’écriture coloriste du Bolognais/Romain et au moins de ce point de vue John Wilson nous choie !
Pourtant c’est la douche froide avec le Box sur les Cadence : pas de scène, pas d’élan, dynamique compressée, ce qui nous incite tout de suite à vérifier ce qui ne fonctionne pas.
On concocte donc un cocktail de maniaques (Tonton Sérieux se moque de moi qui voulais un site adressé au quidam ; mais moi, contrairement à lui, je sais qu’il y a des revendeurs sérieux !) : changement de câbles (mais pourquoi ?), re-disposition des enceintes, vérification de la phase secteur, et surtout, parce que TS (Tonton Sérieux) insiste : « passe sur la sortie 4 ohms ! ». Oui, je voulais le faire. Mais plus tard. De quoi je me mêle ?
Et voilà, après quelques tâtonnements, les envolées sont nettement plus affirmées, les timbres bien plus respirants harmoniquement.
Des timbres tempérés peut-être : l’excursion du chatoiement des matières où le relief des instruments est plus suggérée que creusée ; tempérés mais incontestablement variés, aménageant une densité plausible et rassurante.
On aura très vite envie de tenter de nouveaux tubes, mais cet engin fonctionne déjà très bien comme ça.
La version de Wilson par les arcanes du « Box », (ou de la Box ? Ecriture inclusive ?) reste parfois brouillonne (les passages où un grand nombre de musiciens se ruent par le même portillon), un côté « rendez-vous à la Coda » - plastronne mon collègue -, possiblement dû à un équilibre tonal un rien loudness, un médium ample, embourgeoisé d’un galbe douillet sans cependant jamais tomber dans la caricature des tubes, ouf !
Et une intensité accrue du haut du spectre tendue par une paresse de la respiration harmonique ; pas grave car se dégage à la longue un charme flagrant (inexact ?) qui fonctionne curieusement, devenant très entraînant, captivant même, sorte de fatras au final plutôt organisé. On comprend alors qu’une part de « l’urgence » de l’interprétation tient à l’amplificateur MastersounD !
On apprécie au passage de très belles notes profondes de l’orgue où l’on distingue des strates très correctement décryptées qui racontent que le Box n’explore sans doute pas les soubassements mais procure un grave bien plus net qu’un paquet d’amplis à ampoules…
Je resterai en 4 ohms pour tout le test et, une fois n’est pas coutume, sur presque toutes les enceintes mises à contribution et même après le départ de Tonton Sérieux.
Reprenons :
Dans la série de mes madeleines de Proust (vous avez dû comprendre le principe à la longue) il y a Björk ! Ça alors.
Mais rien que pour m’agacer, je présume, mon subalterne acariâtre me suggère deux versions de Hollow (dont une que je ne connaissais pas) ; il faut reconnaitre que la version originale est sur un album pas vraiment intéressant de la diva islandaise, Biophilia, écrit sous l’influence pesante de Matthew Barney (son mec à ce moment) ; mais c’est vrai, ce morceau-là est classe et le remix par 16-bit très balèze. Au passage, je reçois un petit coup de griffe de mon visiteur qui me fait remarquer qu’il a déjà cité ce titre une ou deux fois dans ses tests.
Deux approches de notes d’extrême grave, l’une par l’orgue classique, l’autre par des sons synthétiques, spectaculaires, très parlantes dans les deux cas qui, ici, confirment cette orientation technique où il est volontairement et intelligemment écourté et ne bave pas, timbre et structure les appuis et les écoulements d’air, mais, revers de la médaille (?), manque de définition de matière sur les percussions.
Aucun surpoids, d’excès de corps : cet ampli déjoue les manies ventripotentes des tubes.
Pour le reste, les modulations et les teintes sont relativement souples et correctement variées tandis que persiste cette sensation pas déplaisante d’excitation, de précipitation ; on sent autour des matières une sorte de gaine – « une gangue » dit l’autre -, un côté propriétaire qui cette fois encore, illumine (pas trop) le haut du spectre ; ça le fait. D’autant que si la tendance montante est identique sur tout type d’enceintes, le gainage est moins perceptible sur les PMC par exemple.
Là aussi, on est tenté d’essayer d’autres tubes, mais ce n’est pas une obligation, ni la réponse à une frustration ou un manque, juste de la curiosité. Je n’en n’ai pas sous le coude de toute façon et TS en a chez lui, soit : à 650 kms. Et il est fainéant.
Ilya Gringolts, Ciaccona, à commencer par les dry (drei) Kleine Szenen de Heinz Holliger (notons le titre de la première : Ciacconina (en pensant à sa petite fille Annina)) composées pour Isabelle Faust (autre amour de mon hôte), entremêlement d’un chant presque dissonant, énigmatique, discret, aux apparitions fugaces, comme aléatoires, et de complexes figures mélodiques du violon, ici interprétées avec un parfait mélange de sérieux et d’humour sur un violon dont le bois (très sollicité sur l’œuvre) est d’une convenable plénitude, légèrement floutée par le lissage nerveux de Box. En cela qu’il édulcore le relief des matériaux. On se satisfait pourtant sans difficulté de cette simplification des timbres campée autour d’un médium enrichi.
Des notes ?
Équilibre tonal :
Richesse des timbres :
Scène sonore :
Je passe ensuite au Concerto pour Orchestre de Bartok par le New York Philharmonic sous la direction de Pierre Boulez (CBS 1973 ?) ; le deuxième mouvement : Giuoco Delle Coppie expose une belle répartition en largeur, plus limitée en profondeur mais sans incohérence non plus. Rien à reprocher aux proportions des pupitres, un peu plus à la précision de leur distribution dans l’espace, mais la prise de son n’est pas exemplaire.
Par contre, il y a quelque chose qui semble passer en force, sans doute parce que les instruments au sein des pupitres pourraient être plus distinctement séparés. Une logique de decrescendo tempère les premiers et arrière-plans de façon que la perspective favorise une zone centrale, une lumière d’extraction en quelque sorte. C’est particulièrement vrai pour bois et cuivres. Ce qui explique aussi qu’on pourrait les souhaiter plus fruités, plus infléchis, les courbes orographiques des violons (oui, je l’avoue, ce n’est pas de moi) plus vertigineuses et émouvantes. Pourtant, cette façon d’isoler des fragments révèle aussi des aspects de l’interprétation, pour ne pas dire de l’écriture, plutôt inattendus.
Intéressant.
Sur un passage moins rempli, plus dépouillé comme le très beau slow « Big Log » de Robert Plant, on apprécie l’espace sonore évidemment composite mais qui crée une perspective intrigante, stable et poétique par les voix situées en arrière-plan dans une réverbération marquée, les claquements de main au tiers gauche et les autres percus très centrées, jouées quasiment comme un thème de basse ; outre que les timbres sont plus que corrects, on note un équilibre tirant légèrement vers le haut. La guitare de Robbie Blunt se déplace au mixage, centrée (large) et en avant sur les chorus, puis reculée (effets de potentiomètre sur la console) sur les contre-chants tout en donnant l’impression qu’elle reste située devant le chanteur mais oscille entre précision et flou. Le délié de cette guitare est très convaincant, dont la lenteur quasi paresseuse au toucher très délicat n’est pas tout à fait dans le groove, mais pas loin. Un disque idéal pour Box.
Scène sonore :
Réalisme des détails :
Le deuxième quatuor (Op 3) de Weinberg par Arcadia (tiens, encore un disque Chandos) explicite le comportement du petit bonhomme transalpin assez atypique mais bien pensé et maîtrisé, à savoir une vitesse apparente incisive obtenue par une syncope subtilement répétitive des enveloppes, notamment des courbes d’attaques, un profil de rapidité abrégée qui fait que le lien entre les notes ou les comparses a quelque chose d’abstrait et que les rebonds internes sont réduits, au profit d’une allégresse (« l’urgence » notée dans la rubrique Timbres) astucieusement machinale. Pas désagréable du tout, à l’encontre de certaines mauvaises habitudes des amplis à tubes (trop ronds) en précisant toutefois que cette caractéristique gagnerait à être plus nuancée, ce qui sans doute contribuerait à une plus profonde lisibilité des silences, un peu vides, et une meilleure séparation des deux violons, évitant sur quelques notes des résonnances de scie, heureusement sans dureté.
Si, sur un disque moins sur le fil, cette fois quelques extraits de More de Pink Floyd (une madeleine ? Pas dans mon paquet à moi !), on ne peut dire que la lecture soit hyper définie, elle est très homogène et restitue un espace plausible sur les oiseaux qui ouvrent Cirrus Minor, beaucoup d’élégance sur les guitares, sèche sur Cirrus Minor, électrique sur The Nile Song, les deux sur Crying Song et…absente Up the Kypher.
La basse est jolie, raffinée et réservée… Pourtant me manque un petit truc. Les demi-teintes ? Partiellement escamotées ?
Si l’énergie de The Nile Song n’est pas vraiment tendue, la batterie passe bien, le tout intelligemment agencé par le MastersounD junior dans une harmonieuse moyenne.
Le pied de grosse caisse devrait pousser plus nettement mais ne manque pas de présence et de lisibilité.
Caroline Shaw avec So Percussion est l’exemple même d’artistes incontestablement talentueux mais qui, croyant pouvoir tout faire et maîtriser, atteignent leurs limites et offrent à l’arrivée un disque prétentieux, « ultra » conceptuel où tout s’arrête à la théorie : Let the Soil Play Its Simple Part.
Déjà, je pense que la compositrice américaine (Pulitzer et tout le tintouin ne consacrent pas tous les dons) ferait mieux de s’abstenir de chanter car on peut imaginer qu’une chanteuse plus lyrique aurait mieux su exprimer des sinuosités d’effets dans les mélodies tourmentées mais identiques et même mécaniques de l’album, donc pénibles et sans âme quand elles sont dévidées par l’américaine surdouée. Les percussionnistes sont sans doute excellents mais n’ont jamais entendu parler du swing et surtout se contentent de jouer à la perfection les notes calées sur la partition. Aussi la surcharge, comment dit l’autre ? prosaïque ? devient fatigante.
Résultat : charge émotionnelle zéro. Dommage, c’est bourré d’idées formidables, d’audaces sporadiques et de mélanges amusants.
A côté de ça, la production est très minutieuse et Box s’en tire plus que bien par la cohésion de son pouvoir de résolution, le « filtre » régulant les attaques et tenues de note ne nuit en rien ici, pour ne pas dire qu’il sublime ce disque où tout est scrupuleusement ordonné et dissocié.
Au risque de me répéter, on n’est pas dans le sfumato souvent admis ou admiré par les amateurs de tubes, mais face à un objet qui, au milieu des couleurs jolies, ne veut pas perdre le sens d’une relative précision.
Evidemment, et afin de faire un pont à la Tonton Sérieux vers la rubrique suivante, cette vocation à la limpidité du langage ne favorise pas exactement le swing dont le disque de Caroline Shaw est déjà avare…
Qualité du swing, de la vitalité, de la dynamique :
On vérifiera que le swing à défaut d’être génial est OK en dégustant quelques bonbons. Après les madeleines, ça ne va pas arranger le poids (pardon, la masse) de TS.
Nous commençons par Apostrophe de Zappa. Toujours pas ma came. Mais pas mal du tout. Le vinyle original ne brillant pas par une dynamique de fou, la retenue en relief organique interne de Box ne sculpte pas en sillons étourdissants ce disque infiniment créatif, mais évite aussi la paresse rythmique.
Puis : Superstition de Stevie Wonder confirmant que sur ce type de musiques assez “nettes”, le Box (ça m’ennuie ce nom, car TS a commencé à me surnommer comme ça (The Big Box) et à mon avis les autres vont suivre) préserve une excellente distinction des infos et un swing très potable à défaut d’un groove totalement funky, alors que la scène est un peu plate, le grave pas totalement ressorti, un peu engoncé. On peut souhaiter des cuivres « roulants » plus présents, des matières plus luisantes mais on ne s’ennuie jamais : bien, bien…
Rapide passage par un genre de swing plus direct tel Joe Chambers, Circles, extrait de Samba de Maracatu : ça fonctionne sans restriction, d’autant que la tension des fûts et percus se situe dans une moyenne élevée.
Constat un peu différent avec Helen Merril (madeleine de l’autre zozo) Dream of You où le souffle de bande est un plus en avant que parfois (l’équilibre un rien montant ?) ; le balancement soft très correct respecte l’aguicheuse malice de la géniale américaine, même s’il n’est pas impeccablement subtil, là encore plus par manque d’inflexions plongeantes que de mouvements des hanches (cette tension nerveuse déjà évoquée ? Je ne sais pas, on finit par s’y habituer). Les cuivres vaguement éteints et la belle contrebasse de temps à autre épaisse dans ses notes les plus basses, confirment une constance de comportement, même après plusieurs changements d’enceintes. Mais, franchement, c’est histoire de dire quelque chose, parce qu’on est quand même loin de toute caricature ou faute de goût.
On sent bien à la longue que toute musique nage entre deux eaux, mais le résultat est bien plus agréable que l’ennui total que l’on subit trop souvent à l’écoute d’amplis trop lisses.
Tout au plus notera-t-on que les musiques requérant une extrême micro-souplesse pâtissent un peu de la philosophie sonore de l’appareil.
Enchainons.
Le Bartok par Boulez est un des moments qui ont révélé qu’il ne fallait pas se tromper sur la phase secteur, où on passe d’un dégagement harmonique étroit, conduisant à quelques duretés (les flûtes), à un meilleur rebond dans un espace plus aéré, quand même pas parfait.
La dynamique générale passe très bien, sans effet d’escalier, mais je reste sur ma faim par l’impression d’un manque de distance (au sens de détachement, d’humour), et de primesautier. Et à l’analyse, il semble que si la dynamique est plutôt expansive dans les éclats, au risque de « stresser » sur les forte, elle est plus contrainte par le bas ; je parle de la lisière des silences, qui donc n’existent pas vraiment, limitant de fait les petits rebonds sensibles.
A noter d’ailleurs qu’il n’est pas aisé de trouver le bon niveau (sur des Cadence « ++ » ou AT18), partagé entre l’envie de pousser pour animer le tout et le danger que ça devienne vite désagréable.
Expressivité et plaisir subjectif :
La série American Recordings qu’enregistra Johnny Cash sous la férule de Rick Rubin à partir de 1994 jusqu’à sa mort en 2003, est poinçonnée par la corrosion de la voix chaude du vieux rebelle. Cette réalité crue ajoute aux récits une poignante intensité que le MastersounD Box accompagne avec sollicitude. Il dessine les guitares folks autour de l’homme au crépuscule de sa vie avec une forme de retenue, sans insister au-delà des contours. On perçoit, légèrement feutrés, les pincements des cordes métalliques ou les déplacements des doigts à chaque transition d’accord. D’infimes détails sont comme atténués pour laisser l’illustre bonhomme déclamer ses derniers prêches blindés de mélancolie. Là encore, Box donne le sentiment de filtrer les enregistrements pour nous focaliser sur les acteurs principaux et leur message.
Pour le coup, ça marche sur des disques comme ça !
Disque très difficile que celui de Kate Bush 50 Words for Snow qui peut vite tourner soporifique. Ce n’est pas le cas avec Box, alors que plus de ductilité, de souplesse des modulations n’auraient pas fait de mal. De fait, la sensibilité est réorientée, la tendresse « maternelle » de Madame Bush comme lustrée, les doux modelés sont aplanis et la sensibilité du dialogue mère/fils, qui évoque la descente d’un flocon de neige, estompée.
Les arrière-plans de percussions surgissent du vide sans être amenés, et les perles égrenées du piano méritent des variations de hauteur plus en apesanteur. Mais c’est beau, sans aucun doute. Et émouvant… comment dire ? Différemment…
On chipote, on chipote, mais parce qu’on sait que c’est possible, notamment chez MastersounD. Sinon, pourquoi il y aurait une gamme ? On ne le répétera jamais assez.
Un autre disque tout en raffinement et sensibilité, Schubert, La Belle Meunière, Andrè Schuen, atteste la perception de silences pas assez habités ; pas vides, mais, comment dire : concaves ? Voix et piano dévoilent un corps un peu léger, mais c’est mieux que trop lourd !
Une petite gêne, un grésillement ténu, apparaît parfois sur les montées du ténor, que l’encombrant TS (en plus il va falloir que je lui prépare à dîner, et c’est un gourmet gourmand, un TS ; en tout !) attribue à un début de microphonie des tubes. Même si nous préférons éviter d’affubler les appareils en tests d’accessoires « gagnants/gagnants », on a quand même placé des Franc Audio sous le Box, pour voir.
Et on s’est demandé s’il ne fallait pas tout refaire.
Non, quand même… Et puis, c’est pas l’idée.
Allons, pour continuer dans les manies de mon invité et pour aller à fond de la découverte de cet intégré italien, on passe The Doomed de A Perfect Circle, le morceau qui pousse le plus sur un album rock plutôt sophistiqué, léché, plus fourni en ballades qu’en gros sons énervés qui tachent. Sauf The Doomed, au relief assez conséquent ! La batterie de Jeff Friedl en tête. Et ça le fait ! ça poétise un peu mais habilement. Pas une énergie de folie mais tant pis car il y a de la vie et une belle unité de pression et de résolution : ça chante à défaut d’envoyer, ça donne du raffinement !
Comme quoi, côté plaisir, l’ampli ratisse large !
Pendant que je nous sers l’apéro, TS met un Nougaro, je me demande pourquoi : en deux jours d’essais en commun, on a fait le tour, non ?
« Quatre boules de cuir ».
Ah ouais, je vois l’idée :
Quatre boules de cuir tournent dans la lumière
De ton œil électrique, Boxe, Boxe,
Ô déesse de pierre
Quatre boules de cuir, mes poings contre les siens,
Moi le jeune puncheur, Boxe, Boxe,
Lui, le vieux Kid Marin…
L’humour de TS.
Voyez le genre…
On en profite cependant pour apprécier la voix et le rythme du regretté Claude, un réel plaisir parfaitement accordé au Chablis à température idéale qui luit dans nos verres…
Cette approche centrée sur un essentiel narratif séduit. Se glisse au milieu des notes une agréable représentation idéalisée de l’humanité qui donne vie aux interprètes. Alors oui, nous restons sur notre faim, avides d’extinctions de notes interminables, de silences habités ou de matières finement gravées, de grain de peau et de doutes existentiels. Mais le pari d’une musique ardente et communicative, caractérisée par un supplément d’âme et de chair, certes idéalisé par Photoshop, demeure payant.
Gageons que cet intégré sera le compagnon idéal d’enceintes rapides, pas exagérément gourmandes, à l’aigu et médium délicats et au grave tendu.
A vous de vérifier le mariage idéal.
Expressivité
Plaisir subjectif :
Rapport Qualité/Prix :
Quand on a testé un objet issu de la famille MastersounD comme l’Evo 300B que j’ai grandement apprécié pour ses particularités marquées, peut-être attendait-on trop de l’entrée de gamme de la marque, au risque d’être sévères, de manquer de pondération.
Parce qu’à l’écoute de Box, il se passe réellement quelque chose d’assez rare qui permet de réjouir les partisans du tube sans faire fuir les détracteurs, et c’est une performance plutôt rare.
En effet, s’il évite les épanchements flatteurs, mous et sirupeux que certains apprécient dans l'univers du tube, et alors qu’il procure à la musique une sorte d’urgence, il sait préserver une poésie à part, faites d’enluminures et de finesse.
Précis, plutôt vif, capable d’élans dynamiques impressionnants, ce petit intégré fait honneur au renom la marque italienne…
A ne pas négliger donc.
The Big Box